Un bug technique peut- il créer sa propre logique artistique ? C'est ce qu'une partie des rédacteurs des "Cahiers" a bien été obligée de se demander après avoir appris qu'ils avaient été les éphémères spectateurs d'une surprenante version de "Grass", mystérieusement dépouillée de certaines pistes sonores. Cette soustraction semblait pourtant obéir à un principe défini, affectant uniquement les dialogues prononcés par les personnages à l''extérieur du café tout au long du film.

Stéphane de Mesnildot livre la critique du film intitulée "Denier voyage".

Sélectionné pour deux films à Cannes (dont "Le Jour d'après" qui sort cette semaine), Hong Sangsoo, s'il parle difficilement de ses oeuvres, parle plus aisément de ses méthodes de travail. Et de son actrice fétiche, sa compagne Kim Min-hee, mégastar en Corée.

Trouble marivaudage où infuse la vie amoureuse du cinéaste sud-coréen et de son actrice, l'émouvante Kim Min-hee.

Dans ce nouveau film avec sa muse Kim Min-hee, le cinéaste poursuit son questionnement sur le réel et sa représentation.

Entre "le Jour d'après", sorti en juin 2017, et "la Caméra de Claire", qui sera distribué dans le courant de l'année, s'insère "Seule sur la plage la nuit", 20e film du Coréen Hong Sang-soo. Avec sa rigueur habituelle, tempérée ici par des accents comiques et fantastiques, le cinéaste met en scène une femme délaissée par son amant, qui, d'un continent à l'autre, se demande comment survivre à l'abîme qui nous menace.

La cinématographie coréenne qui semble avoir produit moins de films de cinéastes consacrés que les autres années a néanmoins franchi la barre des 100 millions de spectateurs pour la 4e année consécutive ce qui est remarquable (à titre de comparaison la France avec 66 millions d'habitants en totalise 213 millions en 2016 ). "Le Tunnel" meilleure recette de l'année a réuni 11 millions de spectateurs à lui tout seul.

Critique du film "Le jour d'après" de Hong Sang-soo, suivie d'une intervieuw du réalisateur et de l'actrice principale, Kim Min-hee.

Ce début 2018 est marqué, pour les cinéphiles, par deux événements importants. D'une part la sortie en salles de "Seule sur la plage la nuit", l'un des plus beaux films de son auteur. D'autre part, la parution des "Variations Hong Sang-soo", un ouvrage collectif d'une rare intelligence. L'occasion était belle de revenir sur la filmographie d'un metteur en scène dont, depuis "Le Jour où le cochon est tombé dans le puits" réalisé en 1996, notre revu a suivi la carrière avec une grande attention. Nous avons tenté de comprendre comment se fabriquait cette oeuvre si particulière.

Les six premiers films de Hong Sang-soo, du "Jour où le cochon est tombé dans le puits" (1996) à "Conte de cinéma" (2005), comportent vingt-six scènes de sexe. Crues et cruelles, vides et répétitives, creuses et laconiques, elles forment un empilement anti-érotique unique dans l'histoire du cinéma. Parce qu'elles sont tristes ? Oh oui... Mais pour un geste maladroit, pour un son qui échappe à une gorge, pour un accessoire qui traîne là, elles sont aussi infiniment belles.

Encore plus que "Le jour d'après", "Seule sur la plage la nuit" est un film sur le monde angoissant de l'après : après une histoire d'amour, après l'effondrement intime, après la perte de tout espoir affectif.

"La Caméra de Claire" est donc le quatrième film d'Hong Sang-soo à sortir en l'espace d'un an, clôturant par le printemps un cycle informel des quatre saisons ("Cahiers" no 739) : à peine le temps de se remettre de la mélancolie blanche de "Seule sur la plage la nuit" que le cinéaste coréen nous propose une comédie primesautière, tournée en mai 2016 en marge du Festival de Cannes, où il profitait de la présence d'Isabelle Huppert pour poursuivre l'expérience entamée avec "In Another Country" cinq ans auparavant.