La «transition» et ce pourquoi on la conduit sont deux choses différentes. L’expression de « transition écologique» est déjà usée et elle est devenue une auberge espagnole, comme «développement durable», alors même qu’elle s’était imposée pour mettre fin aux ambiguïtés du développement durable. La transition est victime de son succès : elle finit par renvoyer à l’économie verte, avec une approche assez technocratique. Dans la sphère des politiques publiques, on parle de «transition énergétique» avec l’idée implicite que cette approche permettra de garder le même modèle de société.

De même qu'elle a déjà produit ses effets en théologie (et au plus haut niveau) avec l'encyclique "Laudato si", la crise environnementale touche peu ou prou l'édifice de la philosophie et l'oblige à prendre le tournant écologigue. "Crise environnementale" veut dire au premier chef époque de l'Anthropocène, celle où les atteintes de l'environnement sont arrivées à un degré tel qu'elles paraissent désormais irréversibles, alors que les multiples applications de l'intelligence artificielle détruisent la vie privée et les liens interpersonnels et participent du délitement de la vie démocratique.

L'homme cultive depuis son adolescence la soif de comprendre et le désir d'agir. Philosophe engagé, spécialiste des questions écologiques, Dominique Bourg pense l'urgence climatique et le déclin de la biodiversité. Il n'hésite pas non plus à investir la rue avec les militants d'Extinction Rebellion.

On a souvent fait grief à la pensée écologique d'entretenir un rapport critique à la modernité. Retour aux sources.

Sombre tableau. Dans "Dévastation", son dernier livre, le philosophe franco-suisse Dominique Bourg explique sans fard les « dynamiques du mal radical » à l'oeuvre : celle de l'éventualité du feu nucléaire au bout des doigts de Vladimir Pouline comme celle de « l'apocalypse écologique ». Seule perspective pour sortir de ce long tunnel plombé : rejouer autrement le néolithique... notamment grâce à l'agroécologie.