C'est un film qui suinte l'angoisse du début à la fin. Dans "Le Salaire de la peur" projeté en 2017 à Cannes en version restaurée, Yves Montand et Charles Vanel incarnent deux têtes brûlées convoyant un camion chargé de nitroglycérine. Sur le tournage, entre Camargue et Cévennes, l'atmosphère est tout aussi explosive. Henri-Georges Clouzot, en proie à la dépression et miné par les nombreux imprévus, joue les tyrans deux étés durant. Ce qui n'empêchera pas le cinéaste de décrocher la Palme d'or en 1953.

A force d'être considérés comme indiscutables, les films de Henri-Georges Clouzot ont surtout fini par ne plus être discutés. Alors qu'une foule d'événements (intégrale en salles, coffret DVD, expositions, documentaires) rendent hommage cet automne à l'auteur du "Corbeau", il était temps de remettre un peu d'ordre à l'intérieur d'une oeuvre tentaculaire, toujours à mi-chemin entre les ténèbres et la grâce.

Doté d'un budget pharaonique et d'une distribution haut de gamme, le projet le plus ambitieux de la carrière d'Henri-Georges Clouzot ne vit pourtant jamais le jour. Autopsie d'un désastre.

Enfin ! Après avoir été aux abonnés absents en 2007, année du centenaire, la République des films rend enfin hommage à Clouzot (1907-1977). Sommaire. Clouzot, enfin ! Clouzot, le pessimisme fécond.

Fer de lance de l'industrie cinématographique française contrôlée par les Allemands durant l'Occupation, la Continental Films, société parisienne aux capitaux allemands, est restée, pendant de nombreuses années, une organisation dans l'ombre. Plus de soixante-dix ans après, on connaît désormais tout - ou presque - de son producteur, Alfred Greven, des trente films qu'y ont été réalisés et des conditions de travail de cet îlot protégé de la production qui répondait aux désirs de certaines autorités allemandes, provoquait les protestations d'autres et échappait à la censure de Vichy. Sommaire.

Cela fait cent dix ans que l'auteur du "Corbeau" a vu le jour, et quarante qu'il nous a quittés. Sans être fétichiste des chiffres ronds, il n'était pas absurde de participer à notre façon à l'hommage qui lui est rendu à travers le pays. A "L'Avant-scène cinéma", nous avons eu d'autant plus de plaisir à le faire que "Le Corbeau" est définitivement l'un des plus grands films du cinéma français. A l'égal de "Quai des orfèvres". Mais "Le Salaire de la peur" est également un chef-d'oeuvre. Alors que "Les Diaboliques", "La Vérité" ou "L'assassin habite au 21" restent de très grands films.