Alors que l'aventure tchétchène, accompagnée de la monstrueuse destruction de Grozny, a été une bonne affaire pour certains, le comportement du président russe rappelle de plus en plus le brejnévisme de la pire époque.

Le président russe, négligé par les Occidentaux dans l'affaire bosniaque, mais soumis à la pression de son opinion nationaliste chauffée à blanc par l'ultimatum de l'Otan, a réussi à transformer la reculade serbe en un triomphe de Moscou.

Les lecteurs russes, qui seront les derniers à lire les souvenirs présidentiels publiés d'abord en Occident, n'y trouveront aucune des réponses qu'ils attendaient. Mais les portraits cruels de tous ceux qui ont "déçu".

Pour mettre un terme à son affrontement avec le parlement, le président russe s'est lancé dans une aventure extraconstitutionnelle dont l'issue est incertaine et dont les risques sont immenses.

Pendant une journée, l'emblème de l'ancien régime communiste a reconquis la rue, et la peur est revenue. Ce sont les militaires russes qui ont écrasé les insurgés, et il reste à savoir quel prix ils en demanderont à Boris Eltsine.

Pour sortir la Russie de l'impasse politique, la Cour suprême propose une "option zéro" : des élections parlementaires et présidentielles simultanées. Le rejet de cette solution pourrait entraîner un éclatement de la Fédération russe.

Alors que beaucoup de Russes doutent de la régularité des conditions dans lesquelles la Constitution a été adoptée, le résultat des législatives apparaît catastrophique pour le président, qui devra composer avec ses pires adversaires.

Les élections du 12 décembre seront "libres" ? Assurément. Mais les conditions dans lesquelles elles ont été organisées apparaissent, aux yeux de beaucoup de Russes, comme fort peu "démocratiques". Et le souvenir de l'attaque du Parlement par les chars reste au coeur des controverses.

Inattendue, la guerre déclenchée par Boris Eltsine en Tchétchénie poursuit son cours sur le champ de bataille. Mais c'est la lutte politique menée à Moscou qu'il faut également observer, afin de comprendre le destin d'Eltsine.

En fermant les yeux sur les nombreuses irrégularités constatées lors des élections législatives, les observateurs européens ont pris la grave responsabilité d'encourage Boris Eltsine à persévérer dans cette voie lors de la présidentielle.