Octogénaires, ils ont tous deux été professeurs d'université. Ils aiment Rousseau, Flaubert et Stendhal. Jean-Pierre Richard privilégie la sensation et Jean Starobinski l'âme. Ils portent très haut l'exigence de la critique littéraire.

On le savait homme des Lumières, grand interprète de Rousseau et de Diderot, auxquels il a consacré des ouvrages devenus des classiques de la critique, bien au-delà des études dix-huitiémistes. On découvre avec "La Beauté du monde", recueil dans lequel la majeure partie des textes ne concerne pas le XVIIIe siècle, que Jean Starobinski a une oeuvre critique beaucoup plus vaste - qui pourtant conforte cette identité.

« L'Encre de la mélancolie » de Jean Starobinski réunit plus d'une vingtaine de textes publiés pour la plupart entre 1960 et 1990 autour de la mélancolie. L'ouvrage offre ainsi au lecteur l'occasion de faire un voyage non seulement à travers le temps, puisqu'on y lit des textes qui se rapportent à l'Antiquité aussi bien qu'à la modernité littéraire, mais encore à travers diverses formes d'écriture : historique, théâtrale, poétique, appelées à dégager certains traits caractéristiques de la mélancolie.

Ce qui fait de la critique littéraire un genre si difficile, c'est que l'examen d'un texte, pour avoir quelque pertinence scientifique, doit s'entourer d'une technicité académique qui, souvent, dresse une barrière entre le lecteur et ce pour quoi, en définitive, le texte a été écrit, le plaisir de la lecture. Pour pratiquer une critique approfondie de la littérature, faut-il donc, si l'on veut ne pas lasser, disposer des moyens de sortir à tout moment de l'exégèse des mots écrits sur la page pour retrouver une vision globale de l'homme qui a tracé ces mots ?

On connaît les très beaux travaux de Jean Starobinski sur Rousseau, comme par exemple ″La Transparence et l'Obstacle″. Les essais réunis ici, sous le titre ″Accuser et séduire″, continuent cette investigation à la fois précise et déroulée selon un fil impeccablement tendu.

Après "L'Encre de la mélancolie" (Seuil, 2012), voici un nouveau recueil d'articles publiés par le grand critique genevois Jean Starobinski (né en 1920). Il rassemble ses textes - sur la littérature et les arts - parus entre 1946 et 2010, en revue ou dans des éditions collectives à l'occasion de colloques, de catalogues, d'hommages. La somme en est impressionnante.

L'oeuvre de Jean Starobinski impressionne, puis enchante par son empan. Depuis plus de soixante-dix ans, elle interroge la littérature et la médecine, les arts visuels et la musique. La reprise de son premier grand texte critique, publié dans la Suisse contemporaine en 1946, et sa mise en situation par une réflexion nouvelle sur « les pouvoirs du masque » (1) permettent d'en mesurer la cohérence et l'importance.

Homme de lettres et médecin, Jean Starobinski est un "historien par sympathie", des idées, de la mélancolie, à laquelle il a consacré de nombreux ouvrages.