Succès monstre à sa sortie, en 1988, solidement ancré dans l'inconscient collectif depuis, le blockbuster hybride du trio Disney/ Spielberg/Zemeckis ne s'est pourtant jamais décliné en franchise. Le lapin zozotant pouvait-il vraiment survivre aux "80s" ?

Jadis façonneur de mythes "pop" couronnés de succès, ("Qui veut la peau de Roger Rabbit", "Retour vers le futur" et "Forrest Gump"), Robert Zemeckis enchaîne depuis dix ans des œuvres au ton étrange ou rebelle aux étiquettes ("The Walk", "Alliés", "Bienvenue à Marwen"). Son imaginaire excentrique désarçonna jadis le public avec "La Mort vous va si bien", gros échec commercial, et film auquel ces "Sacrées Sorcières" se rattachent le plus. Pionnier des corps numériques, Zemeckis est un formaliste des effets spéciaux qui plient les éléments narratifs au visuel.

Quel âge a Tom Hanks ? On ne sait plus. Les pistes ont été brouillées par le cinéma de Robert Zemeckis, avec sa mallette d'éternel élève de Méliès et son amour contagieux des paradoxes temporels : rencontres de Michael J. Fox avec lui-même ("Retour vers le futur"), de Bob Hoskins avec un lapin de celluloïd ("Qui veut la peau de Roger Rabbit ?") , de Meryl Streep avec son reflet rajeuni ("La mort vous va si bien"), de Hanks avec un président mort ("Forres t Gump") - Hanks devait lui-même devenir un toon au nez rond dans "Le Pôle express", premier opus d'une trilogie en motion capture.

Alors que "Here" se joue dans des salles vides, "La mort vous va si bien", un autre flop signé Robert Zemeckis, mais réalisé au siècle dernier, n'a jamais fait autant parler de lui. À quelle substance peut bien carburer cette satire cartoon pour tenir une forme pareille ? "Première" a profité d'un relifting en 4K pour mener l'enquête.

En adaptant le merveilleux "Ici", de Richard McGuire, qualifié à sa parution d' "ovni graphique", Robert Zemeckis et son fidèle coscénariste Eric Roth ajoutent une pièce à la collection peu fournie des oeuvres axées autour d'une trouvaille à laquelle on s'étonne que personne n'ait pensé auparavant. Les auteurs des nombreux films tournés en un lieu unique tentèrent d'échapper à la logique théâtrale en multipliant les points de vue. "Here" propose un point de vue identique pour chaque plan.