L'Ecrivain critique
Numéros de page :
258 p. / p. 7-264
L'ouvrage, à partir d'exemples qui vont de l'âge classique à la modernité, interroge les relations entre création et écriture critique, chez ces auteurs Janus, auxquels on a reproché parfois d'être juge et partie. Bien avant que la presse n'institutionnalise au XIXème siècle la critique en fonction rémunératrice, les écrivains se sont chargés d'énoncer règles et critères d'évaluation des oeuvres et de défendre les principes qui les conduisaient. Les stratégies de pouvoir et de reconnaissance entrent évidemment en ligne de compte, mais l'écrivain a aussi pensé sa pratique critique comme une alternative généreuse à la critique « froide et institutionnelle » des journalistes professionnels et des universitaires. La revendication d'objectivité scientifique de la « critique des professeurs » se renverse souvent en défense de la singularité et d'un « point de vue » situé, d'une critique d'affinités qui revendique la partialité sensible. Les spécialistes sollicités ont non seulement étudié dans leur relation les deux « visages » de l'oeuvre - création personnelle et activité critique - mais ont aussi examiné les genres et supports de cette dernière. Lettre à un ami ou à l'Académie française, discours, avertissement, traité, article en revue, chronique, essai : tous les genres ont peu à peu été investis par l'expression critique, jusqu'au roman, au Journal, à l'aphorisme, au poème depuis Gautier et Baudelaire. La prise en compte des supports de la critique permet aussi d'affiner la perception des enjeux et des clivages. Ceux-ci n'opposent pas seulement critique professionnelle et « gens de métier », mais interrogent le rapport de l'écrivain aux règles, aux héritages, à la part de l'inconscient, ou encore à celle des savoirs et connaissances, des systèmes de pensée de son temps.