Moraliser le capitalisme ?
01 mars 2022
Numéros de page :
pp.4-15
Depuis que, sur le plan géopolitique, ne s’élève plus de concurrent idéologique comparable à ce qu’ont été, dans l’histoire, le marxisme ou le communisme, une critique capitaliste du capitalisme a progressivement vu le jour au sein du champ économique et du champ politique. Cette critique aboutit à ce que des entreprises développent des formes internalisées d’action « éthique ». D’abord promues à la fin des années 1990 à travers la reconnaissance et la prise en charge d’une « responsabilité sociale des entreprises » (RSE) en matière de conditions de travail de leurs sous-traitant.e.s ou d’interventions sur des questions de société, ces formes d’action se sont ensuite diversifiées. Les années 2000 et les suivantes ont en effet vu fleurir les dispositifs d’égalité professionnelle femmes-hommes, de diversité, de mécénat de compétences ou de bénévolat d’entreprise. Le souci de la protection de l’environnement ou, plus globalement, de la participation à l’intérêt général a donc donné naissance à des initiatives managériales et à des dispositifs de gestion cherchant à contrôler, à mesurer, à optimiser et à afficher « la production symbolique de "l’entreprise". Cette attention renouvelée du capitalisme pour l’éthique s’est aussi transformée en intérêt économique : dans cette logique, le respect des attentes politiques, sociales et environnementales doit être rentabilisé, tant et si bien qu’une équivalence entre morale et profit est recherchée. L’objet du dossier est ainsi de documenter toute une série de dispositifs équipant cette équivalence et permettant de poser la question suivante : s’agit-il, pour les professionnel.l.e.s, les groupes sociaux et les individus concernés, de « moraliser » le capitalisme, de capitaliser sur la morale ou d’articuler – et alors dans quelles conditions – recherche du profit et recherche de la vertu ? Sommaire. Moraliser le capitalisme ou capitaliser sur la morale ? Le féminisme de marché, ou comment la demande d’égalité « pour toutes » est devenue une égalité pour certaines. Les stigmates de la vertu. Légitimer la diversité en entreprise, à New York et à Paris Le lobbying ou l’emballage vertueux des marchandises. Quand les agro-industriels s’opposent aux agrocarburants au nom de l’environnement Un éthos pondérateur. Adoucir et filtrer la critique écologique, l’ouvrir au capitalisme. Et vice versa. De quoi le capitalisme se soucie-t-il ?, entretien avec Emily Barman. Sur le site Cairn : utiliser la navigation article par article pour consulter l'intégralité du dossier.