Pierre La Police, une forme particulière d’étrangeté
Bulletin : Les Arts dessinés 19
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Numéros de page :
pp.48-55
Dans sa création, Pierre La Police a toujours recherché l'objet-livre avant toute chose. Plus que la finalité même de produire du dessin, son travail tenu par la narration trouve son expression dans cet objet, y malmenant déjà la bande dessinée tout en évitant certains de ses fondamentaux, tels la bulle ou les compositions savantes de planches. Sa formation artistique englobe un tout. et c'est ce "tout" qui est l'oeuvre. Marquant nettement ces territoires graphiques ; de ses dessins autonomes, riches de matières graphiques, d'accidents, de ratures... à son travail de bande dessinée, où son dessin se dépouille, lâchant le réalisme qu'il poussait parfois dans les accidents de sa pratique. Ce qu'il pose dès le premier "Praticiens", celui de 1989, par un amalgame esthétique poreux, c'est une révolution et la transformation du graphzine vers cette bande dessinée qui mute dans les années 1990. Il est un des rares venant de cet univers. tourné viscéralement vers le dessin pur et les doctrines de pur dessin posées par "Elles sont de sortie", à avoir englobé la tentation de la bande dessinée, à en offrir une proposition alléchante loin de la référence anecdotique. Peut-être parce que ce romantisme du dessin pur n'était pas son combat premier, tournant peut-être à vide par rapport à ses préoccupations et son écriture. Son écriture est une matière en soi, et il est réducteur qu'elle ne soit prise que comme ressort comique, placée dans le champ de l'humour parce que l'on n'en comprend pas complètement sa viscérale matière littéraire.