Jean Rouch est mort au crépuscule, à l'est du Niger, un pays qu'il adorait, dans un accident de voiture en 2004, à l'âge de quatre-vingt-six ans. Il était né le 31 mai 1917. Rouch fut un grand savant avant de devenir un grand poète. Docteur ès-lettres, ingénieur civil, ethnologue, attaché au CNRS et au musée de l'Homme, il a parcouru l'Afrique pendant plus de soixante ans pour en faire un portrait intime, amoureux, fraternel. Autour de plus de cent films, tout en prenant le temps d'être une des grandes figures institutionnelles de la Cinémathèque française, inventeur d'un style et le déclencheur de nombreuses carrières de cinéastes, il a commencé son oeuvre dans l'Afrique coloniale pour l'achever au début du vingt et unième siècle. Dans cette oeuvre, l'exotisme n'existe pas. Ou plutôt l'exotisme est constamment interrogé pour être retourné, torturé, malmené. Pour mieux faire du cinéma, ce cinéma qu'on a appelé après lui et quelques-uns de ses contemporains, le "cinéma vérité", sous les auspices de Dziga Vertov et de son Kino Pravda.