Religion du souverain, souverain de la religion
Bulletin : Revue historique 663 - juillet 2012
01 juillet 2012
Auteurs
Numéros de page :
16 p. / p. 643-658
Après la conclusion du Concordat et l'établissement de l'Empire, la date de la fête nationale est fixée au 15 août, jour anniversaire de la naissance de l'Empereur et fête de l'Assomption. A la demande des autorités françaises, la papauté invente même un saint de toutes pièces, qu'elle inscrit dans le calendrier liturgique et qu'elle dote d'un office que doit réciter l'ensemble du clergé en y associant les fidèles. La création de cette dévotion, fondée sur le nom même du souverain régnant, illustre de manière presque caricaturale la mobilisation de la religion au service de l'Etat, jusque dans ce qu'elle a de plus sacré, la prière. C'est que, contrairement à la place qu'elle occupait sous l'Ancien Régime, la religion n'est plus à l'origine de la souveraineté - ce qui d'ailleurs justifiait l'intervention de la puissance publique : elle n'en constitue plus qu'un attribut. La dévotion à saint Napoléon ne parvient pas à survivre à l'Empire : plus que le mauvais vouloir d'une partie de l'Eglise, soucieuse de se dissocier théologiquement de l'Etat, il faut plutôt invoquer la mutation, sous l'effet d'un double processus de sécularisation et de politisation, de la figure traditionnelle du saint en mythe politique.