La Rivalité des pardons
Bulletin : Revue historique 665 - janvier 2013
01 janvier 2013
Auteurs
Numéros de page :
32 p. / p. 57-88
L'étude du ressort des lettres de rémission permet de mesurer l'impact de la justice du roi de France au sein de son royaume, et donc de territorialiser et de quantifier la souveraineté. Le roi accorde sa grâce dans tout le royaume, sauf trois principautés (Bretagne, Barrois, Guyenne anglaise). Les rémissions émises par les chancelleries princières sont moins nombreuses et bien plus mal conservées (Barrois). La grâce du roi domine très largement dans le royaume, y compris dans les principautés de l'intérieur (Etat Bourbonnais). Seuls les Pays-Bas bourguignons font exception, à cheval entre Empire et royaume. Une étude quantitative des rémissions octroyées par les deux chancelleries (royale et ducale) dans un même territoire, l'Artois et la Flandre, est possible pour les années 1498-1502. Elle montre leur concurrence ainsi qu'un partage coutumier de l'espace des Pays-Bas bourguignons entre l'appel auprès de la chancellerie de Paris (Artois) et l'appel auprès de la chancellerie de l'archiduc (Flandre flamingante), la Flandre wallonne étant partagée. Ces pratiques suggèrent que la souveraineté royale a survécu en Artois jusqu'au règne de Charles Quint, portée par une pratique populaire du recours au roi contre la justice ducale. La souveraineté ici redéfinie comme justice en dernier ressort reliant la capitale et les sujets du duc, ne survit pas à la guerre des années 1520 qui impose une frontière fondée sur la domination militaire.