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Joann Sfar sur le vif

01 octobre 2023
Numéros de page :
pp.24-35
Toute la durée de l'entretien, Joann Sfar, de retour de quelques jours de vacances loin de sa table de travail, n'a quitté ni sa plume, ni son papier, ni son sourire, comme rasséréné. C'est que ce genre de sevrage ne lui arrive pas souvent, à lui qui envisage le dessin non pas comme une action mais comme un état favorisant le geste de créer. Le dessin comme manière d'être - et de vivre. Il se doit donc d'être un flux continu qui se méfie des temps morts, jusqu'à rendre réelle l'illusion que jamais rien n'a de fin, que l'oeuvre et la vie brandiront toujours fièrement un cartouche « à suivre » dans la dernière case de la toute dernière page, au tout dernier instant. Et la magie opère : un jour, Emmanuel Guibert et Joann Sfar s'émeuvent devant la lettre d'une toute jeune lectrice de Sardine de l'espace qui s'inquiétait de savoir comment se portait son héroïne, avant la parution de sa nouvelle aventure. Preuve que l'attention dépasse le simple cadre de la fiction. C'est à cette forme de permanence que le musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme, à Paris, rend hommage à travers l'exposition "Joann Sfar, la vie dessinée", visible jusqu'au 12 mai 2024. L'auteur y trouve un écrin de choix pour dérouler le fil d'une oeuvre abondante qui, si elle atteste de la grande importance du dialogue et du questionnement, sanctifie le dessin. Un dessin qui entrelace le réel et l'imaginaire, dans un geste d'amour.