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Par-delà les cathares : conflits de pouvoir et hérésie dans le diocèse de Lucques, XIIe-XIVe siècles

01 juillet 2019
Numéros de page :
pp.577-627
L’hérésie médiévale est au centre d’un vaste débat historiographique de portée internationale déclenché il y a vingt ans, lorsque des publications françaises ont posé des questions brûlantes : l’hérésie médiévale a-t‑elle pu parfois être inventée par les hommes du Moyen Age ? L’étendue des déviances doctrinales médiévales a-t‑elle pu être surestimée par les historiens qui l’ont étudiée ? La controverse s’est installée, et pour cause : les enjeux du débat ne concernent en effet pas seulement la manière d’appréhender l’hérésie médiévale, mais investissent plus largement la manière de faire l’histoire et de traiter les sources. Cet article entend proposer une réflexion méthodologique sur l’approche des sources médiévales documentant l’hérésie, à partir de l’étude des nombreuses affaires attestées dans le diocèse de Lucques, en Toscane, du XIIe au XIVe siècle : des sources variées et parfois inédites (témoignages dans un procès, lettres pontificales, sculptures, documents inquisitoriaux) y dénoncent des hérétiques qu’elles désignent de plusieurs noms (patarins, ariens, « pauvres de Lyon »). Si l’historiographie a invariablement vu derrière ces affaires la manifestation de déviances doctrinales, qu’elle a parfois uniformisées en les désignant de « cathares », une analyse à nouveaux frais permet d’ancrer ces affaires dans des conflits politiques plus larges : il en résulte clairement que ces accusations d’« hérésie » sont bien loin de cibler des déviances doctrinales, mais se nourrissent d’enjeux sociaux et politiques.