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Maryse Choisy, championne oubliée du journalisme d'immersion

01 octobre 2020
Numéros de page :
pp.164-167
Quand Florence Aubenas publie en 2010 "Le Quai de Ouistreham", les lecteurs plébiscitent ce livre-choc qui relève d'un genre ancien, le journalisme d'immersion. L'exercice a des contraintes. L'anonymat le plus total est impératif et l'intrus doit avancer masqué. Fixée à Caen pendant six mois, la reporter s'était glissée dans la peau d'une demandeuse d'emploi pour vivre sous une identité fictive la vie des plus démunis qui errent d'un boulot de misère à l'autre. Plus de 200 000 exemplaires sont écoulés, des adaptations diverses seront lancées. Avant elle, le journaliste d'investigation allemand Günter Wallraff, qui inspira Florence Aubenas, avait deux années durant enchaîné les métiers les plus rudes, les plus déclassés. Grimé en ouvrier turc sans carte de travail, portant perruque, lentilles et grosse moustache, l'infiltré avait pris la tête de l'emploi pour être embauché. Il a trimé comme une bête, comme un Turc. Témoignage authentiquement vécu, son enquête ravageuse sur les conditions de travail du monde d'en-bas parue en 1985 puis traduite sous le titre « Tête de Turc » avait conquis les faveurs du public : plusieurs millions d'exemplaires vendus en RFA, 500 000 en France. Au concours de l'inventeur de ce journalisme d'infiltration qui serait d'origine américaine et attribué trop rapidement, semble-t- il, à Humer S. Thompson, les femmes ont la part belle. Elles seraient même les initiatrices.