Pour son troisième long métrage, après le singulier documentaire "Retour à Kotelnitch" (2003) et l'adaptation tardive de son propre roman - jugé inadaptable - "La Moustache" (2005), Emmanuel Carrère mêle réel et fiction en adaptant l'ouvrage retentissant de Florence Aubenas, "Le Quai de Ouistreham". Le projet porté par la volonté de Juliette Binoche permet au romancier cinéaste de s'approprier le sujet, en y greffant un des thèmes récurrents de son oeuvre romanesque : la mise en abyme de la création elle-même. En transformant la journaliste Florence Aubenas en romancière nommée Marianne Winckler, Carrère s'approprie donc l'oeuvre d'origine, tout en prolongeant le jeu avec le réel, puisque la comédienne a pour partenaires des non-professionnelles, dont certaines figuraient dans le livre ! Cet étonnant jeu de miroirs, tout en étant fidèle au propos social de sa source, l'enrichit d'une vertigineuse réflexion sur les paradoxes de l'artiste : c'est ce dont l'auteur nous entretient dans les pages qui suivent. Sommaire. Entre deux mondes, la critique du film. "C'est merveilleux, quand quelque chose venant de l'extérieur vous touche d'aussi près", entretien avec Emmanuel Carrère.