Les critiques de la recherche militante intersectionnelle sont-elles l'expression d'une vision du monde? En ce cas, deux visions du monde s'affronteraient sans pouvoir se départager, comme s'il s'agissait de deux sectes ou de deux factions politiques, l'une progressiste, l'autre réactionnaire (le "réactionnariat" selon Nicolas Truong). Il faudrait alors trouver des compromis raisonnables entre les deux, admettre que la recherche a pour but de lutter contre les discriminations (comme le suggère le nouvel exposé des objectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche) ; et, en revanche, les militants devraient s'abstenir d'interdire des cours ou conférences et d'attaquer des enseignants. En somme, trouver une troisième voie qui s'écarterait des extrêmes. Cette troisième voie ressemble fort cependant à un "wokisme républicain", qui défendrait une laïcité élargie et une société diversitaire, en considérant l'inclusion de minorités multipliées sans fin comme l'aboutissement ultime de la démocratie. Une première mise au point s'impose. La fonction des universités et des laboratoires n'est pas de lutter contre les discriminations passées ou présentes, mais contre l'ignorance. L'élaboration et le partage des connaissances peuvent éclairer des faits sociaux et guider en cela l'action politique, mais elles se situent dans un autre domaine, où les préjugés perdent évidemment toute valeur critériale.