Caldara, né sur la lagune vers 1670, a ainsi offert à Barcelone le premier opéra jamais entendu en terre catalane, Il più bel nome (1708), une commande de son futur patron Charles VI, auprès duquel il s'installera, à Vienne, en 1716. Prolixe compositeur avec trois mille oeuvres à son actif, il y décède en 1736 dans la même Kärtnerstrasse que Vivaldi... et dans une semblable précarité. Johann Mattheson écrivit à son propos qu'il possédait, comme Händel et le Prêtre Roux, "une grande connaissance des sentiments humains et des émotions". Loin de toute superficialité, sa pâte sonore porte très haut la rhétorique et les artifices du baroque. (Electre)

C'est sous le couvert d'un séjour en Arcadie, contrée utopique cachée au coeur de la géographie européenne, que se déroule cette rêverie proposée par Brice Sailly en hommage à François Couperin. Les pièces de clavecin, qui évoquent majoritairement l'enfance et la naissance de l'amour, y côtoient des extraits des Concerts royaux qui plantent le décor à la façon d'un Watteau, laissant aux airs de cour, moins connus, l'occasion de décrire les sentiments en mots. Couperin chuchote avec pudeur les plus lumineuses vérités. Ici, la bienveillance règne, sourire aux lèvres, coeur léger, la mélancolie est doucement remerciée au profit de la consolation. (Electre)

En 1683, Michel-Richard de Lalande entre comme sous-maître à la Chapelle Royale, après avoir été soutenu par Louis XIV lors d'un redoutable concours de recrutement. ?é seulement de 25 ans, le jeune compositeur va rapidement s'affirmer comme le favori du roi et conquérir en presque quarante ans de carrière les emplois les plus convoités de la cour. Le monarque l'associe même à la construction de la nouvelle Chapelle Royale, attenante au Château de Versailles. Au fur et à mesure que les voûtes s'élèvent, Lalande compose et arrange ses motets, qui expriment la grandeur alors sans égale du royaume, en même temps qu'ils témoignent de l'acoustique incomparable du lieu. Psaumes, hymnes, Te Deum, ses oeuvres enregistrent dans la liturgie l'atmosphère de la cour, au rythme des troubles et des réjouissances. Après avoir enregistré à la Chapelle Royale les Te Deum de Lully et de Charpentier, Vincent Dumestre et Le Poème Harmonique sont de retour à Versailles et abordent les musiques composées par Lalande pour ce lieu extraordinaire. Aux grands motets Deitatis majestatem et Ecce nunc benedicite, synthèses de la pompe royale et du langage de l'opéra, se joignent le bouleversant Miserere et le Te Deum le plus grandiose joué sous Louis XIV, celui du roi lui-même. (Electre)

Sémiramis torturée par les maléfices de Zoroastre, violence, inceste, meurtre et magnificence : voici l'une des plus étonnantes tragédies lyriques ! Son compositeur Destouches eut un destin hors du commun : Missionnaire au Siam, puis Mousquetaire dans l'Armée Royale, il se découvre musicien et se forme auprès de Campra. Sa première ouvre lyrique, Issé, triomphe en 1697 devant Louis XIV. Vingt ans plus tard, sa dernière tragédie-lyrique, Sémiramis (1718), est d'une grande force dramatique, celle du destin funeste de la Reine de Babylone qui, craignant l'oracle d'un fils qui la mènerait à la mort, l'a abandonné dès sa naissance. Mais Arsane, le fils adoptif qu'elle adore sans savoir sa naissance, accomplira la volonté des dieux pour sauver sa bien-aimée Amestris, rendu fou par la magie de Zoroastre. De ce livret puissant, Destouches tire des effets saisissants qui font de son ouvre ultime un véritable torrent passionnel. Margaux Blanchard et Sylvain Sartre portent à l'incandescence cet opéra de l'amour impossible.

Sainte Théodosie de Tyr refuse l'amour d'Arsène, fils du gouverneur, car elle préfère se vouer à Dieu : pour avoir offensé les puissants, elle endurera de nombreux tourments, qui mèneront à sa mort. Alessandro Scarlatti narre son martyr dans un oratorio tantôt violent, tantôt lumineux, et dissèque les passions humaines à travers une fresque saisissante. Interprété avec talent par les quatre solistes, Emmanuelle de Negri, Emiliano Gonzalez Toro, Anthea Pichanick et Renato Dolcini, en compagnie des fougueux musiciens des Accents dirigés par l'archet de Thibault Noally, ce drame musical ébranle par sa force dramatique et la beauté du chant.