Alain Resnais, dans ce film qui sera son dernier, pousse toujours plus loin le jeu sur l'artifice et sur la désorientation du spectateur. Des portes en tissu claquent avec le bruit du bois, les horloges sont en trompe-l'oeil et les feux de cheminée immobiles, le soleil est une simple tache ronde surexposée sur un ciel peint, l'herbe du cimetière est orangée, l'écran devient rouge de colère. L'invention formelle du réalisateur de "L'Année dernière à Marienbad", de "Providence", de "Coeurs" et des "Herbes folles" ne se sera jamais tarie.

La suggestion d'obsèques nationales ainsi que l'obtention d'une rue parisienne à son nom, une avant-première en présence du président de la République, un enterrement couvert par toutes les télévisions, un hommage à la Cinémathèque assuré par le gratin du cinéma français : la disparition d'Alain Resnais a été saluée comme il se devait. A la réflexion, pas grand-chose à l'aune du tintouin déclenché autour de celle de Georges Lautner - mais les fanatiques des "Tontons flingueurs" sont plus nombreux que ceux de "L'Année dernière à Marienbad".

Le cinéaste a disparu juste avant la sortie de son dernier film, adapté d'une pièce du Britannique Alan Ayckbourn : une nouvelle farce sépulcrale, hantée par l'écrit.