Après "P'tit Quinquin", le Chti Bruno Dumont s'est définitivement converti à la comédie. Et a décidé de faire appel à des acteurs professionnels, Fabrice Luchini et Juliette Binoche, dans son prochain film, "Ma Loute". Une révolution pour ce cinéaste réputé radical. L'Express s'est rendu sur le tournage.

"Ma Loute", de Bruno Dumont, est le film le plus dingue du festival. L'auteur s'explique.

"Ma Loute" est un film d'une audace inouïe. Non seulement le cinéaste ose reprendre les principaux éléments de la série qui lui valut un grand succès, "P'tit Quinquin", ce qui en soi est culotté, non seulement il transpose l'histoire à la Belle Epoque, mais il la transcende en inventant un genre qui les mêle tous : burlesque et gore, enquête policière et drame sexuel. Il innove dans sa propre pratique : de grands acteurs professionnels donnent la réplique aux non-professionnels, la musique emporte les moments tragiques.

Toujours fidèle à lui-même et toujours là où on ne l'attendpas, l'auteur de "P'tit Quinquin" revient avec un drôle de film en costume sur fond de lutte des classes dans les plaines du Nord.

Après la série télé "P'tit Quinquin", ce réalisateur exigeant et parfois difficile, poursuit son virage burlesque. Récompensé en 1999 pour "L'Humanité", il revient à Cannes avec "Ma Loute". Une comédie grinçante où des stars, Luchini, Binoche, côtoient des non-professionnels. Le cinéaste laisse libre cours à son goût du contraste. Un art de la confrontation que l'on retrouve aussi dans l'équipe qui l'entoure.

Le cinéma prétendu radical de Bruno Dumont avait pris un tournant inattendu, celui de la "comédie policière", avec le succès de sa série "P'tit Quinquin" diffusé sur Arte. "Ma Loute" poursuit cette veine jusqu'au délire, alternant le burlesque et d'autres genres comme le polar ou le drame "rural", avec des détours par le fantastique au sens large (du gare au merveilleux), mêlant acteurs connus (Fabrice Luchini, Juliette Binoche, Valeria Bruni-Tedeschi) et non professionnels.

Avec "Ma Loute", Bruno Dumont confirme qu'il est non seulement un de nos grands cinéastes français, mais aussi un génie de la comédie.

Le comique inouï inventé par "P'tit Quinquin" n'a pas seulement fait craquer toutes les coutures du cinéma de Bruno Dumont : il a ouvert la grande fresque sur le Mal de ses précédents films à la dimension d'une plaie béante- cet informulable "bordel" dont le commandant Van der Weyden tentait de rendre compte tout au long des quatre heures de puissance exorbitée que durait la série. Comment revenir au format canonique d'un long métrage après avoir ainsi envoyé valdinguer tous les repères d'une oeuvre jusqu'alors parfaitement contrôlée ?

Après " Le P'tit Quinquin", Bruno Dumont signe un nouveau sommet de drôlerie burlesque.

Réputé austère, le réalisateur va faire s'esclaffer ou hurler la Croisette avec une farce où des prolétaires cannibales mangent des bourgeois. Interview d'un cinéaste qui en a marre de "l'esprit de sérieux" et veut que "ça gicle" !