Après deux décennies de repli, l'Etat, à la suite notamment de la crise de 2008, est de nouveau l'objet d'attentes fortes et a retrouvé un rôle important dans la conduite de la vie économique. Si certains indicateurs, nombre de candidats à l'ENA, diminution des "pantouflages" témoignent de l'attractivité élevée en France de la haute fonction publique, celle-ci n'en est pas moins confrontée à la disparition des "grandes carrières" mêlant parcours publics et privés et à une interrogation sur le rôle désormais dévolu à ses membres.

Créée après guerre, l'Ecole nationale d'administration devait former des grands commis de l'Etat ; bicentenaire, l'école normale supérieure avait pour mission de produire un corps enseignant d'élite baigné de valeurs humanistes. Devenues des instruments de reproduction de la classe dirigeante française, ces deux institutions prestigieuses tentent de s'imposer comme un sas vers le monde des affaires.

Homogénéité sociale, excès de formatage, immobilisme : avec son mode de recrutement des élites, notre pays se prive de multiples talents, estime Ezra Suleiman (1)

Le ministère de l'Enseignement supérieur a donné le label Cordées de la réussite à 100 dispositifs d'ouverture sociale sur le modèle de Sciences-Po ou de l'Essec

Les établissements d'excellence à la française polémiquent entre eux sur la manière de pratiquer l'ouverture sociale. Dans le collimateur : le mythe du sacro-saint concours juste et républicain est de plus en plus mis en cause.

Avec onze PDG de multinationales issus de ses rangs, l'Ecole des Hautes Etudes commerciales est devenue la quatrième usine à patrons au monde. Son secret : la puissance de son réseau et son sens du lobbying. Au point que les jaloux parlent d'une « mafia HEC » dans les entreprises.

Issus des voies d'excellence, leurs diplômés trouvent un travail bien payé dans l'année qui suit leur sortie. Mais ils ne comptent encore parmi eux que 35 % de femmes.

Un administrateur provisoire a été nommé. Le faste des années Descoings a vécu. Les tensions restent vives, dans l'attente d'un nouveau directeur.