A Bias, la demande de pardon d'Emmanuel Macron n'efface pas la douleur.

Un seul mot évoque des centaines de milliers d’êtres humains aux destins différents, souvent dramatiques. Ils tentent, depuis plus de soixante ans, de construire une mémoire collective avec la France pour y puiser, enfin, la reconnaissance. Sommaire. Harkis, une si longue tragédie. La harka avant les harkis. Les mots pour comprendre. 200 000 à 400 000 supplétifs ; Les dates clés : infographies. Devenir harki. Des missions militaires… et civiles. Ce que les Algériens leur reprochent. Ceux qui les ont abandonnés. Fuir ou mourir… Ceux qui les ont aidés. Intellectuels : le grand malaise.

Dans un tout autre répertoire, les lecteurs de "L'art de perdre" d'Alice Zeniter ont applaudi un livre d'histoire qui était le roman de cette histoire de la mémoire harki. Alice Zeniter y a fait entendre les voix jusqu'ici étouffées d'une longue souffrance. Son roman n'a rien cédé à l'exactitude historique, il n'a rien « inventé » et pourtant le roman demeure sa forme ultime. Alice a expérimenté cela, dans "L'art de perdre" (titre emprunté à la poétesse américaine Elizabeth Bishop), que l'histoire apprenait à s'écrire par les voies du roman et non contre.

Durant la guerre d'Algérie, les supplétifs de l'armée française ont été sacrifiés aux yeux de leurs enfants. Un an après la loi ouvrant la voie à des indemnisations, et malgré la demande de pardon d'Emmanuel Macron, ils ne peuvent cacher leur déception.

Au printemps 2023, dans le Gard, près de l'un des camps où leurs familles furent parquées dans des conditions indignes après avoir fui l'Algérie, des fouilles ont exhumé des tombes d'enfants. La mémoire refoulée d'un passé douloureux.

L’année 1962 est celle de l’indépendance. Enfin ! Mais le pays est un chaos : les réfugiés affluent, les camps de regroupement se vident tandis que des centaines de milliers de gens fuient dans des conditions dramatiques : les Français d’Algérie et les Juifs, qui deviennent les "pieds-noirs", mais aussi les harkis, supplétifs musulmans menacés de mort. L’indépendance n’a pas tout réglé. Après vingt ans d’une dictature militaire "socialiste", le pays est déchiré par la montée de l’islamisme et bascule dans une guerre civile, qui fait 500 morts par semaine entre 1993 et 1995.