Mobiliser du capital bureaucratique. Le cas des réformes financières des années 1980
01 décembre 2022
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pp.62-79
La place des hauts fonctionnaires dans le champ du pouvoir est une question qui traverse les recherches en sociologie et science politique. Des travaux s’intéressent à la construction de la domination bureaucratique, d’autres au rôle de différents types d’acteurs dans la conduite de l’action publique, d’autres encore réalisent la sociographie des microcosmes dans lesquels s’insèrent les élites administratives. Si la connaissance des champs bureaucratiques nationaux et internationaux a connu des avancées ces dernières années, la notion de capital bureaucratique mérite aussi que l’on s’y arrête. Pour ce faire, il est intéressant de se pencher – comme l’ont fait Pierre Bourdieu et Rosine Christin dans leur étude pionnière de la réforme de la politique du logement dans les années 1970 – sur les moments de réforme. Ces derniers donnent en effet à voir les ressources que procure ce capital à ses détenteurs, et la façon dont ils les mobilisent. Ainsi, après avoir discuté sa portée théorique, l’article propose d’illustrer le pouvoir heuristique de ce concept à partir d’un cas empirique, celui de la réforme du système financier français par le cabinet Bérégovoy et la direction du Trésor dans les années 1980. L’étude montre comment les deux formes de capital bureaucratique, à base technique et à base d’expérience, s’opposent et se complètent, et comment l’analyse, nécessairement relationnelle, des rapports de force qu’elles génèrent implique de tenir compte à la fois de la structure de l’espace social et du contexte sociohistorique.