Christian Dotremont
Bulletin : Europe
01 mars 2019
Numéros de page :
pp.3-211
Né en 1922 à Tervuren, dans la périphérie de Bruxelles, Christian Dotremont fut un adolescent révolté qui publia à 18 ans son premier livre de poèmes. L’ouvrage fut imprimé peu de temps avant l’invasion de la Belgique par les troupes allemandes. Séjournant à Paris sous l’Occupation, Dotremont participa aux activités du groupe surréaliste « La main à plume ». C’est à cette époque qu’il rencontra Eluard, Picasso, Magritte et Bachelard. Après une brève aventure « surréaliste-révolutionnaire », il fut en 1948 l’initiateur de CoBrA, groupe international d’art expérimental. L’effervescence créatrice, le goût de la spontanéité, l’intérêt pour les arts premiers, les arts populaires et l’art brut caractérisèrent ce mouvement qui prit fin en 1951. Cette année-là, au Danemark, Dotremont entama un long combat contre la tuberculose. Au même moment, il rencontra Bente Wittenburg. Devenue Gloria dans son œuvre, elle prit place à jamais dans son « entreprise passionnelle de longue haleine ». Au cours de l’hiver 1956, Dotremont se rendit pour la première fois en Laponie. L’inspiration nordique illumina dès lors son œuvre. Il renouvela au fil des années ses lointaines expéditions septentrionales. « Après avoir été un des acteurs principaux de la réflexion d’avant-garde, puis le fondateur d’une peinture nouvelle », a pu dire son ami Yves Bonnefoy, « il devint dans ses années de voyage et de demi-solitude un des plus véridiques poètes qui aient alors écrit en français, ajoutant même à l’expression poétique une dimension graphique imprévue encore. » L’aventure poétique de Dotremont trouva au début des années soixante un nouvel élan fécond dans la pratique des logogrammes, dessins de mots et peintures de langage manifestant une unité d’inspiration verbale et graphique. En Laponie, ce n’est pas au pinceau, à l’encre noire sur papier blanc, mais dans la neige et la glace que Dotremont traça ses poèmes : « Il m’arrive d’avoir le sentiment, quand je trace un logogramme, d’être un Lapon en traîneau sur la page blanche, et de saluer la nature comme au passage, par la forme même de mon cri ou de mon chant ou des deux tout ensemble. » Dotremont disait aussi : « Il faut voler le feu sans perdre les braises ni les cendres, ni le froid pour lequel on l’allume, ni le froid vers lequel il disparaît ». C’est l’intensité bouleversante d’une oeuvre et d’une vie que l’on retrouve dans ce numéro d’"Europe" consacré à ce magnifique poète. Sommaire. Les lieux de Christian Dotremont. « Vers la vie quotidienne et la vie collective ». La rue de la Paille. Nous sommes allés chercher Jorn à la gare. Deux lettres et demie à Christian Dotremont. Rencontre avec Dotremont. Amour et maladie. De la littérature à la "N.R.F". Poèmes de collège. Lautréamont comte de Maldoror. Raymond Roussel, le poète extrême. Paul Eluard, le poète de la Résistance. Jean Cocteau. René Magritte. "Aurélien" d'Aragon. "Histoire de ne pas rire" de Paul Nougé. Kara. Ailes et sabots. Les logogrammes de Christian Dotremont. L'écriture habite le papier. Déclinaison du logogramme. Rimbaud, Apollinaire, Dotremont : de l'écrit à l'image. Dotremont ou l'anti-scribe. Voix de l'écrit. L'importance d'être un artiste. Entretien sur la neige. La vie tremblante. « Mon lingue ma bègue ». « Les éclaboussures d'encre de ma voix ». Ecrire à l'ombre de Baudelaire. Le cinéma comme expérience. Ni deuil ni dieu pour Groucho-the-Look. Photo/graphies dans l'oeuvre de Christian Dotremont. Clic, clic, clic, Dotremont en noir et blanc. Missives et instantanés "stratifiés". Dernier jour. Dotremont déjà jadis.