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Kinuyo Tanaka, la part du calcul dans la grâce

01 février 2022
Auteurs
Numéros de page :
pp.86-87
En découvrant les six films admirables et audacieux de Kinuyo Tanaka (1909-1977), restauré au Japon et distribués pour la première fois en France par Carlotta, on réalise que celle qui joua chez les plus grands du cinéma classique japonais (250 films en cinquante ans de carrière, des rôles décisifs chez Mizoguchi, Shimizu, Naruse, Ozu... ) était une star paradoxale. Comparée à Bette Davis (qui se qualifiait réciproquement de « Tanaka de l'Amérique ») lors de sa visite en 1949 à Hollywood en « ambassadrice de bonne volonté », elle ne partage pourtant pas le pragmatisme de ses homologues américaines, leur séduction spectaculaire tous feux dehors, entre cruauté sexy et humour rauque. Avec son visage rond, sa bonté pâle, ses gestes délicats, Tanaka, lune plutôt qu'étoile, rappelle les héroïnes du vieux Griffith : un jeu en retenue pensive, avec des éclairs d'inconscience affleurant au creux de la franchise. Observatrice plus que centre de l'attention, assurant les liens entre les autres personnages sans tirer la couverture à elle, sa présence semble veiller sur les films qu'elle interprète.