Les identités collectives peuvent-elles se passer du religieux qu'elles avaient historiquement repoussé ? Rien n'est moins sûr, si l'on en juge par la Russie, après le vide laissé par la disparition de l'URSS et par l'Europe occidentale, "aire culturelle" en phase d'élargissement et de redéfinition.

Le président Dmitri Medvedev est bien décidé à sévir contre ceux qui mettraient en doute la victoire de l'Union soviétique dans la Seconde Guerre mondiale. Et son rôle de libérateur en Europe de l'Est

En 1991, sombrait l'URSS. S'en suivait un fol élan d'espoirs et d'utopies. Qu'en est-il de la Fédération de Russie vingt ans après ? Une oligarchie au ″pouvoir verticale″; une grande puissance en carton-pâte, dont l'apparence, entretenue par le duo Poutine-Medvedev, cache mal l'appauvrissement. A la manière des décors réalisés jadis par Potemkine pour impressionner Catherine II. A la veille des législatives et de la présidentielle, voyage dans l'envers du décor.

Le troisième mandat présidentiel de Vladimir Poutine amorçait déjà, en mai 2012, une nouvelle ère marquée par la répression du mouvement de contestation démocratique. Avec l'annexion de la Crimée, en mars dernier, Moscou affiche une nouvelle ambition géopolitique, celle de rassembler le "monde russe" au-delà des frontières de la Fédération. Non seulement les Russes sont les porteurs d'une "civilisation singulière" et d'une "mission historique", mais le Kremlin veut faire d'eux les gardiens des valeurs traditionnelles, très éloignées de celles du monde occidental.