Frais, piquant, coloré, poétique et endiablé. Bijou d'animation, "Linda veut du poulet !" décoiffe. Chiara Malta et Sébastien Laudenbach l'ont créé à quatre mains, avec trois bouts de ficelle et plein d'originalité. En prenant, surtout, les enfants au sérieux.

Autres temps, autres fixettes. Il y a quelques décennies, une certaine Zazie à qui son oncle voulait faire découvrir les beautés de la capitale ne pensait qu'à une chose : descendre dans le métro. Aujourd'hui, une autre gamine tout aussi délurée exige que sa mère lui serve d'urgence un poulet aux poivrons. Telle la Zazie de Qyeneau semant la pagaille sur son passage, Linda, 8 ans, va provoquer un beau chambardement dans la cité où elle vit, entre ville et campagne.

Auréolé du Cristal du meilleur long-métrage du Festival du film d'animation d'Annecy, "Linda veut du poulet" est l'une des sensations visuelles de l'automne 2023. Sous ses airs loufoques, cette comédie familiale réjouissante sur l'insoumission et le deuil magnifie la spontanéité, la fraîcheur et l'esprit de résistance de l'enfance. Nous y retrouvons le trait épuré et l'animation vive et légère de "La Jeune Fille sans mains" (2016), ébouriffante relecture du conte de Grimm par Sébastien Laudenbach.

Fêter 70 ans de "Cahiers" en se replongeant dans des films que la revue a su comprendre et aimer, ce n'est pas seulement regarder en arrière, mais continuer à dire ce qui les maintient vifs, tranchants. Indissociablement, l'hommage de la longévité à la jeunesse et au présent passe par une très bonne nouvelle: même en temps d'activité zéro de l'exploitation en salles, les films continuent à être imaginés, écrits, préparés, tournés, montés et mixés.