Le Premier ministre devait s'attaquer aux "vrais problèmes" du pays, sans souci de l'échéance présidentielle. Devenu présidentiable, il agit si prudemment qu'on l'accuse d'immobilisme calculé, et pas seulement à gauche...

Chirac traite en égal ce grand commis à l'allure empesée qui fut, comme lui, distingué par Georges Pompidou. Mitterrand et ses proches le considèrent comme le moins dérangeant des premier-ministrables de la cohabitation qui s'annonce. Alors, Balladur à Matignon ? C'est compter sans les barons du RPR... et sans le réveil d'un "partenaire" nommé Chirac.

Après la salve de Philippe Séguin, les flèches de Simone Veil et Pierre Méhaignerie, le Premier ministre peut-il encore compter sur sa majorité ?

Quarante voix ont manqué au Premier ministre lors du vote sur l'autonomie de la Banque de France. Et, de plus en plus, les bouches s'ouvrent : "trop gestionnaire", "pas assez ferme", "trop centriste". Celui que certains appellent déjà "l'intérimaire" risque de connaître un sort à la Chaban.

De B à R, de Biographie à Réforme, voici le portrait du nouveau Premier ministre, grand commis tenté par l'aristocratie, séduit par la littérature et saisi par le pouvoir.

L'homme qui affirme, dans son style feutré, "les Français n'attendent pas de nous que nous ne fassions rien", a décidé de s'attaquer en priorité au couple justice-insécurité. Par des moyens qui décoiffent...

Tempêtes monétaires, nuages sur les lois Pasqua, tangage interne : la coalition gouvernementale passe de mauvaises vacances. D'autant que le profil de plus en plus présidentiable du Premier ministre modifie tous les calculs.

Le Premier ministre a très mal vécu la réserve de Jacques Chirac pendant la crise monétaire. Dans son féal le maire de Paris commence à voir un rival. Histoire d'un désamour plus profond qu'on ne l'a cru.

Champion de France toutes catégories des sondages d'opinion, il a inventé une nouvelle façon de gouverner. Enquête sur un homme secret qui a découvert par hasard son vrai talent : la communication.

Bien sûr, Edouard Balladur n'est pas responsable de l'aggravation de la crise mondiale. Mais il a promis une décrue du chômage et la mise en oeuvre d'un "nouvel exemple français". On commence à déchanter.

Les sondages le plébiscitent. Et les états-majors commencent à douter : combien de temps le Premier ministre pourra-t-il feindre d'ignorer qu'il est, aux yeux de beaucoup, le président virtuel ? Et que les chiraquiens ne s'avouent pas battus...

Ce n'est plus l'état de grâce, c'est l'état d'immunité ! En dépit de toutes ses difficultés, de tous ses revirements, le chef du gouvernement règne sans partage sur les sondages. Explication d'un miracle.