Malgré toute l'admiration qu'ont eue pour elle des auteurs aussi différents que Marcel Proust, qui ne pouvait la lire sans être ému jusqu'aux larmes, ou Simone de Beauvoir, qui trouva en elle une double inspiration littéraire et féministe, les Français souvent privés de bonnes traductions, ne mesurent pas encore l'importance de George Eliot.

Pour la merveilleuse romancière anglaise, lectrice de Pascal et traductrice de Spinoza, la vie est une longue phrase qui ne peut se lire qu'à l'envers.

L'automne 2018, les historiennes Mona Ozouf et Michelle Perrot consacrent respectivement un ouvrage aux écrivaines du XIXe siècle George Sand et George Eliot qui écrivirent toutes deux sous pseudonyme masculin.

Le roman de George Eliot mérite, ou ne mérite pas, le label de roman historique. Historique, il revendique de l'être, mais que la modeste magistrature de Monsieur Vincy puisse servir à dater l'ouvrage autant que le roi George IV et le duc de Wellington dit assez que le coeur du sujet sera la descente du politique vers le domestique. Les événements de l'histoire n'auront droit d'entrée dans le roman que pour la chiquenaude qu'ils donnent aux destins individuels, vite amortie du reste par le train-train monotone du quotidien.