Le plus vexant pour le chef de l'Etat, c'est que Sarkozy lui a volé sa méthode : dynamisme, culot, pragmatisme. Histoire de ses relations avec un rival qui lui ressemble comme un double.

L'accord passé entre le président et son clone rebelle ne doit pas faire illusion. Chirac veut encadrer le nouveau président de l'UMP pour mieux le contrôler. Sarkozy veut incarner le renouveau de la droite pour rendre sa candidature à la présidentielle incontournable.

Le patronat vient de critiquer vertement la politique économique de "ce pauvre monsieur Raffain". Gesticulation rituelle de rentrée ? Pas seulement : à leur tour, les CCI, institutions d'ordinaires pondérées, sonnent l'alarme, jugeant inefficace la lutte contre le chômage.

Fonds structurels européens, emplois familiaux, prêts à taux zéro, allègement de l'ISF... A chaque fois, le président a contraint le futur patron de l'UMP à reculer.

Qui pour succéder à Raffarin ? Chirac avait son favori : Dominique de Villepin. Mais aujourd'hui il déchante. On le dit même "consterné". D'autant qu'aucun autre ne s'impose à ses yeux.

C'est un changement d'époque que le futur président de l'UMP veut incarner. Et, face aux amis du président qui s'organisent, il est décidé à rendre coup pour coup.

Le départ de Sarkozy et le oui du PS à la Constitution européenne redonnent de l'oxygène au chef du gouvernement. Il ne veut plus se laisser piétiner par ses ministres.

Chirac l'a décidé : les Français seront consultés au printemps sur la Constitution européenne. Peut-il prendre le risque de plomber ce grand rendez-vous en s'accrochant envers et contre tout à un Premier ministre que tous les sondages disent usé ?

Des voeux aux Français, des voeux aux forces vives, c'est à chaque fois le même discours optimiste, volontariste, moralisateur...

L'objectif de Sarkozy : ringardiser Chirac et lui brûler la politesse pour faire entériner sa candidature à la présidentielle par les militants. C'est la stratégie de l'empêchement. Celle du président : étouffer son adversaire pour mieux rester maître du temps.

Raffarin a beau répéter qu'il est à l'écoute, c'est une fin de non-recevoir qu'il a infligée aux manifestants du 5 février 2005. Au risque de pousser les électeurs de gauche à dire non au référendum pour dire non à sa politique.

Jacques Chirac l'a pressenti l'été dernier pour succéder le moment venu à Jean-Pierre Raffarin. Aujourd'hui, le ministre de l'Intérieur s'impatiente : il s'estime prêt et ne voit rien venir...