Dans l'« Essai sur l'entendement humain » (1690), John Locke définit la « Loi de l'opinion » comme « cette approbation ou cette désapprobation, cette louange ou ce blâme, qui par consentement tacite et secret s'installent en diverses sociétés, tribus et associations humaines à travers le monde ». Dans son ouvrage de 1962 (« Strukturwandel der ffentlichkeit »), Habermas écarte la « loi de l'opinion » de la « préhistoire » de l'opinion publique proprement dite.

Jrgen Habermas ne serait-il pas le dernier représentant des Lumières allemandes, l'ultime défenseur d'un engagement raisonnablement optimiste en faveur de la libre discussion, de la libre pensée, de la "raison profane" ?

Moraliser la tradition allemande : c'est l'objectif que s'est assigné le philosophe, figure intellectuelle la plus significative de l'Allemagne d'après-guerre.

Les vies des philosophes ont toujours éveillé la curiosité, depuis Diogène Laërce et ses "Vies et doctrines des philosophes illustres". Montaigne était "bien marri que nous n'ayons une douzaine de Laertius",car il était "curieux de connaître les fortunes et la vie de ces grands précepteurs du monde, comme de connaître la diversité de leurs dogmes et fantaisies". Sans doute sommes-nous curieux, nous aussi, de savoir comment ceux qui prétendent vivre dans le monde des idées s'accommodent, ou non, des difficultés d'une vie bien terre à terre. Sommaire. "La vieillesse est un naufrage".

Habermas ne désarme pas. A quatre-vingt-trois ans, l'auteur de ″Droit et démocratie″ n'est pas seulement un des rares (le seul ?) intellectuels européens dont les interventions publiques résonnent bien au-delà de leur sphère nationale. Il est surtout celui qui, depuis vingt ans, a mis le plus de coeur et de constance dans son combat en faveur de l'intégration européenne.

Pourquoi la religion prend-elle, comme en témoigne son dernier recueil traduit en français, Entre naturalisme et religion, une part grandissante dans la réflexion du philosophe allemand ? Cela vient d'une interrogation sur les limites de son approche procédurale : il s'inquiète ainsi des ressources éthiques d'un Etat libéral moderne. La démocratie peut-elle faire face au risque d'une sécularisation qui déraille ?

Grand commandeur du champ intellectuel européen, Habermas fait l'objet, à 88 ans, d'une intense actualité éditoriale. Où l'on constate qu'il est peut-être la principale référence intellectuelle d'Emmanuel Macron, d'ordinaire associé à la pensée de Paul Ricoeur.