Composé par Pierre Vilar - le neveu de l'historien homonyme -, l'ensemble des écrits de Michel Leiris sur l'art : 666 pages. On y compte, outre les textes de l'écrivain, des bibliographies, mais aussi d'abondants essais du commentateur sur les artistes qui ont retenu l'attention de Leiris. En très petit nombre : André Masson, Joan Miro, Alberto Giacometti, Pablo Picasso, Wifredo Lam, Francis Bacon, les figures majeures du XXe siècle avec qui Leiris eut des liens d'amitié.

″Le surréalisme, qu'il s'agisse d'art, de philosophie ou de politique, est d'abord de la poésie″, écrit Michel Murat dans un récent ouvrage, titré justement : ″Le Surréalisme″. Doit-on ajouter à cela la correspondance ? Pourquoi pas !

Le Centre Pompidou-Metz propose jusqu'au 14 septembre 2015 une exposition foisonnante sur le parcours de Michel Leiris, écrivain, poète, ami des artistes mais aussi ethnologue, qui répondit avec enthousiasme à l'appel de l'Afrique.

Denis Hollier, dès son premier ouvrage, "La Prise de la Concorde" (Gallimard, 1974), s'est imposé comme un des meilleurs lecteurs de Georges Bataille. Il a exploré les années trente dans plusieurs ouvrages dont "Les Dépossédés. Bataille. Caillois, Leiris. Malraux. Sartre" (Ed. de Minuit, 1993). Ses travaux sur le Collège de sociologie ("Le Collège de Sociologie. 1937-1939", Gallimard, rééd. coll. "Folio essais", 1995) sont autorité. Il enseigne la littérature française à New York University.

Les textes écrits par Michel Leiris durant les années trente réunis dans le volume récemment paru sous la direction de Denis Hollier présentent une disparité remarquable : journal de voyage, autobiographie, poésie, essai, lettres et articles. Un thème pourtant revient avec insistance, celui de la tauromachie.

C'est le propre des fantômes que d'avoir plusieurs vies. Parue d'abord en 1934, republiée en 1951, puis à nouveau en 1981, à chaque fois avec une nouvelle préface de Michel Leiris, objet d'une première édition critique en 1996 (dans la collection "Quarto" de Gallimard) et aujourd'hui d'une nouvelle édition critique dans la "Bibliothèque de la Pléiade" : "L'Afrique fantôme" est décidément une revenante. Elle n'en finit pas de reparaître, ni de réapparaître.

Leur Correspondance inédite l'atteste : poètes et agitateurs surréalistes, Michel Leiris et Jacques Baron ne craignaient pas de donner des coups et d'en prendre !

Dans un manuel de lycée autrefois très moderne - ou bien était-ce ailleurs ? -, l'expression qui définissait Leiris était celle qui figure ici en titre. La parution d'un volume de la Pléiade contenant ses écrits autobiographiques (à l'exception du Journal) donne à ces mots tout leur sens.

Michel Leiris (1901-1990), intellectuel majeur et pugnace, est simultanément poète, autobiographe, ethnographe de métier, ami de très grands artistes et écrivains, témoin du XXe siècle. A Metz, cette exposition (complexe, parfaitement réglée, bien pensée) rassemble près de trois cent cinquante oeuvres : peintures, objets et sculptures d'Afrique, manuscrits, films, photographies, musique.

Dans le texte qu'il a pris soin de rédiger lui-même pour le bulletin de souscription à la précieuse édition, illustrée de lithographies par André Masson, de son "Glossaire j'y serre mes gloses", publiée en 1939 par Daniel-Henry Kahnweiler, Michel Leiris précise ses ambitions et la règle du jeu qu'il joue avec les mots : "Entre ses planches utilitaires et ses cintres religieux, pour empuantie que soit la scène, le monde ne saurait devenir si fermé qu'il n'y reste un peu de place pour le jeu.

Un nouveau volume de la Pléiade révèle un Michel Leiris jeune trentenaire qui cherche sa place littéraire tout en affirmant une vision singulière du monde qui ne le quittera plus.