Enquête sur Aung San Suu Kyi. Son CV est de rêve mais, à 70 ans, la prix Nobel de la paix craint que le cours des événements ne lui échappe. Alors elle compose au risque de se perdre.

En birman, ″Chan″ veut dire ″paix″, mais Chan n'est jamais en paix. Elle court la campagne pour défendre les paysans spoliés par la junte militaire. Son père, son oncle, ses professeurs, tous passés par la prison, lui font confiance. Dressée sur ses baskets pour parler au micro, Chan se bat pour que le pays surmonte sa peur. Comme elle.

L'an dernier, la reprise du dialogue entre la junte et l'opposition avait suscité les plus grands espoirs. Mais la "grande réconciliation" promise ne vient toujours pas.

Les militaires qui ont confisqué la victoire de l'opposition démocratique il y a sept ans s'enrichissent par le trafic de la drogue et se maintiennent au pouvoir grâce à la terreur, avec le soutien affiché de rares pays occidentaux, dont la France.

Les généraux birmans jouent la séduction pour attirer le capitaux. Ce ravalement de façade ne rend pas compte de la situation réelle, comme a pu le constater Claude B. Levenson, qui a rencontré à Rangoon la lauréate du prix Nobel de la paix.

La figure de proue de l'opposition birmane est désormais "libre", mais son téléphone est toujours coupé et ses projets de déplacements doivent être soumis aux militaires.

Après le limogeage du premier ministre Khin Nyunt, en octobre 2004, les chefs de la junte ont changé, mais la dictature reste. Arrêtée il y a deux ans, la dirigeante de l'opposition, Mme AungSan Suu Kyi, demeure en résidence surveillée.

Prix Nobel de la paix en 1991, la fondatrice de la Ligue nationale pour la Démocratie a été "libérée" en 1995, après six ans d'assignation à résidence, mais il lui est toujours interdit de quitter Rangoon.