Malgré la peur et la solitude, cet anonyme ivoirien recueille dans le chaudron abidjanais les témoignages de violations des droits de l'homme.

A Abidjan, Guy-André Kieffer était devenu la bête noire du pouvoir. Journaliste bien introduit dans les cercles dirigeants, il connaissait de l'intérieur les dérives de l'entourage du président Gbagbo. Sa disparition depuis le 16 avril 2004 alourdit encore le climat qui règne dans le pays.

Malgré de multiples signes avant-coureurs, le gouvernement français n'a pas vu - ou n'a pas voulu voir - que le président ivoirien Laurent Gbagbo n'avait pas renoncé à résoudre la crise par la force.

Incohérences, hésitations, maladresses. Politiques, diplomates, militaires, tous ont commis des fautes. Et la politique française du "ni indifférences ni ingérence" se retoune contre Paris.

Après avoir paralysé Abidjan, les jeunes "patriotes" à la solde du président Laurent Gbagbo ont fini par quitter les rues. Mais rien n'est résolu dans le pays toujours menacé par des convulsions politiques et ethniques.

Le président élu Alassane Ouattara tente de s'emparer des leviers financiers que contrôle encore le clan Gbagbo. Une tâche de longue haleine.

"Pas d'armée, pas de coup d'Etat", disait Félix Houphouët-Boigny. Pourtant, ce sont des militaires - en rupture d'engagement avec une armée en décomposition - qui ont déclenché, le 19 septembre, une rébellion qui menace l'unité de la Côte-d'Ivoire.

Fragilisée, comme d'autres pays d'Afrique, par la "clochardisation" de son armée, la Côte d'Ivoire ne parvient pas à enrayer la rébellion qui progresse dans le nord du pays.

Pour la première fois depuis l'indépendance, l'armée a pris le pouvoir en Côte d'Ivoire. Personne n'a secouru le président déchu, qui avait dilapidé l'héritage d'Houphouët-Boigny.

Pour écarter un rival potentiel lors de l'élection présidentielle d'octobre 2000, le président ivoirien, Henri Honan Bédié, n'a pas hésité à remettre en question l'un des piliers de la stabilité ethnique du pays.

Plusieurs fois repoussée depuis 2005, l'élection présidentielle ivoirienne a été fixée au 29 novembre 2009. Cependant, des retards dans l'identification des électeurs pourraient provoquer un nouveau report du scrutin. Si la paix est revenue en 2007, après cinq ans de conflit armé et de violences, le pays demeure traversé de vives tensions sociales. Précarisée mais volontaire, oscillant entre lutte pour la survie et quête du pouvoir, la jeunesse constitue à la fois l'enjeu et la clé de la crise.

Pendant que le débat français sur l'identité nationale dégénère, le Président de la République se réjouit : A deux mois des régionales, c'est un os qu'on donne à ronger aux médias et à l'opposition, déclarait-il fin décembre, selon Le Canard enchaîné. On ne parle plus du reste, de la situation économique et sociale, du chômage et de la crise. Pourtant, c'est aussi sur ce terreau que prospère cette nouvelle idéologie d'Etat, comme l'indiquent deux expériences étrangères.