Le temps d'une lettre, l'écrivain s'imagine à la place du président irakien.

Il paraît tout d'une pièce, il aime les idées simples et les schémas en noir et blanc. Pourtant, George Bush junior est plus complexe qu'on ne le croit. Quel est le vrai "W" ? Un fils à papa sans vraies convictions ou l'héritier de Reagan ?

Des pays Baltes aux Balkans, des vieux apparatchiks aux anciens dissidents, pourquoi les ex-pays communistes de l'Europe de l'Est sont-ils plus atlantistes qu'européens ?

Est-il encore possible d'éviter la guerre en Irak ? Non, au vu du formidable déploiement militaire désormais en place au Moyen-Orient. Oui, si contre toute attente Saddam Hussein respecte pour une fois ses obligations, justifiant ainsi, simultanément, le choix français du processus de désarmement pacifique et l'option américaine de la menace militaire.

L'administration américaine veut faire la guerre et la fera sans doute. Mais que d'obstacles sur sa route ! La France et l'Allemagne, bien sûr, mais aussi la Ligue arabe, l'opinion britannique, le Conseil de Sécurité toujours rétif, le Parlement turc qui ne veut pas de ses soldats, Saddam Hussein qui devient presque habile, et même le pape.

Dans un discours au Commonwealth Club de San Francisco, dont nous publions des extraits, le grand écrivain américain explique pourquoi la guerre en Irak n'est pour l'Amérique que le premier pas vers la domination du monde. Et pourquoi la démocratie est menacée.

Les Etats-Unis vont-ils lancer la première guerre sans provocation directe de leur histoire ? Fort de ses convictions religieuses, habité par la vision d'un monde opposant le Bien et le Mal, guidé par des conseillers conservateurs qui croient à la démocratisation par les bombes, le président américain est si sûr de son droit qu'il n'entend ni les critiques ni les mises en garde.

Pour les Américains, l'attitude de la France est incompréhensible, insupportable. Alors l'administration Bush a décidé de punir l'alliée qui lui a manqué. Rétorsions économiques, représailles pétrolières, sanctions diplomatiques : tout est envisagé. Mais entre-temps Chirac a rallié tous ceux qui s'opposent à l'hégémonie américaine.

L'offensive de George Bush sera sans doute victorieuse. Mais elle a commencé par un échec : la Berezina diplomatique essuyée par les Etats-Unis à l'ONU. Le président américain a beau désigner la France comme bouc émissaire, il a dû se résigner à faire la guerre pratiquement seul. La guerre ne sera donc qu'américaine.

En menaçant la France de torpiller le sommet d'Evian, les Etats-Unis ont obtenu de Chirac les pleins pouvoirs en Irak. Ils privent ainsi le président français de son meilleur atout, alors que Paris n'est toujours pas à l'abri d'une "longue pénitence" pour avoir résisté à Washington.

Près de 300 des 900 sites répertoriés ont déjà été fouillés en vain : pas la moindre trace de l'arsenal terrifiant brandi par les Américains et leurs alliés pour rallier le monde à leur cause.