Revoici "la mort de la littérature". Trop souvent annoncée pour n'être pas intensément souhaitée, évidemment. Mais le livre d'Henri Raczymow, contrairement à ce qui s'est écrit depuis quelques années, en revient au vrai débat intellectuel, sans ressentiment personnel. Sa lecture est donc passionnante. Sa thèse, s'appuyant sur l'idée que la démocratie est désormais arrivée à son terme, et que "la mort de la littérature est fondamentalement inscrite dans le projet démocratique lui-même. Il s'agit là d'un "irréversible" à la Péguy". Ainsi, "quand Louis XIV reconnaît Racine, quand la "nation" reconnaît Voltaire ou Rousseau, quand le "peuple" reconnaît Victor Hugo ou Zola, quand l'"opinion" publique reconnaît Sartre, les choses sont simples. Mais qu'en est-il des instances contemporaines de la reconnaissance?" ... Il est logique, finalement, que ce livre de deuil, ce "Vive la sociale!" intellectuel, conclue à la mort de la littérature. Et comme on souhaiterait continuer ce débat, on aimerait suggérer à Henri Raczymow un autre essai, commençant ainsi: "Oui, la littérature est morte pour tous ceux qui la prenaient pour un geste d'appartenance sociale. Et alors?" Extr. de : J. Savigneau, in : Le Monde, 1994-11-11