De COP en COP, la compensation carbone est promue comme un moyen privilégié d'atteindre la neutralité carbone. Introduit il y a quelques années, le mécanisme des crédits carbone, censé faire payer les entreprises polluantes et les États à hauteur des émissions qu'ils génèrent, apparaît pourtant avec le recul comme un instrument de plus de greenwashing, inefficace mais profitable pour certains intermédiaires. Plus grave : les projets de compensation carbone aboutissent dans de nombreux cas à l'expulsion des populations locales de leurs territoires.

À la COP28 de Dubaï comme à l’intérieur de leurs frontières, Paris et Bruxelles défendent l’idée d’une « croissance verte », formule magique censée réconcilier l’économie capitaliste et l’écologie autour de quelques mantras : développement durable, technologies écologiques, finance écoresponsable ou encore économie circulaire – autant d’oxymores apparents sur lesquels se penche ce numéro du "1 hebdo", pour mieux en comprendre les ressorts et les objectifs. Cette « croissance verte », pourrait-elle nous permettre d’éviter la catastrophe sans bousculer nos modes de vie ?

Les dispositifs destinés à accompagner les élus dans leurs politiques de transition écologique sont toujours plus nombreux. Pourtant, ces derniers peinent à passer le cap. Plusieurs obstacles les paralysent, jusqu'à les faire glisser dans le greenwashing

Les faits sont connus : au sommet du corps social, à la pointe de la pyramide des revenus, au cœur des beaux quartiers et dans les alcôves des lieux de pouvoir, une petite bande de grands fortunés se met super bien. Sur le dos du reste de l’humanité, et aux dépens de l’habitabilité de la planète, doit-on s’empresser d’ajouter. Cette infime minorité de privilégiés, plutôt douée pour duper son monde sur les questions écologiques ou pour se ménager des portes de sortie, ne saurait cependant perdurer et prospérer sans toute la valetaille disposée à servir ses intérêts.

Si Total est largement critiqué pour sa contribution au dérèglement climatique, son premier actionnaire sait rester discret. Malgré son ambition affichée de « verdir réconomie », le plus gros gestionnaire d'actifs en Europe, filiale du Crédit Agricole, investit généreusement dans les producteurs d'énergies fossiles, qui cherchent de plus en plus à se passer des banques pour lever du capital.

Obligations vertes, placements durables... A son tour, le monde de la finance se pare d'une conscience écologique et crée des produits estampillés "éthiques". Comptes d'épargne et caisses de retraite font miroiter à leurs clients des placements propres. Parmi les entreprises ainsi financées : l'industriel belge Umicore. Sur le papier, l'entreprise a réussi sa transition de l'activité minière vers le recyclage. Dans les faits, les vestiges toxiques de son passé ternissent son bilan. Un exemple parmi d'autres du gouffre qui sépare les promesses et la réalité.