La crise de la dette grecque est venue rappeler, dix ans après la crise argentine, que l'insolvabilité des Etats peut avoir des conséquences économiques extrêmement graves. Ces derniers sont coupés de leurs sources de financement et contraints de mener des politiques d'austérité. Les crises de dettes souveraines peuvent également provoquer un désordre monétaire profond qui amplifie les récessions et entraîne des transferts de richesses. A l'heure actuelle, il n'existe aucun cadre multilatéral à l'intérieur duquel organiser la restructuration des dettes souveraines.

La crise des dettes souveraines et la défense de la zone euro, soumise aux turbulences des spéculations, ont été l'occasion de nombreuses interrogations sur l'attitude de l'Allemagne. Celle-ci est-elle touchée par la vague eurosceptique qui balaie l'Europe ? Explorer l'incompréhension de l'attitude allemande, c'est accepter de comprendre le regard porté par ce pays sur ses voisins et singulièrement sur son principal partenaire, la France. Pour ne pas s'en tenir à la politisation des malentendus nationaux, ce dossier procède en deux temps.

L'endettement de la Grèce cache la forêt des créances accumulées par les Etats européens. L'application, sous contrainte, d'un strict programme de réformes pourrait permettre aux Hellènes de bénéficier d'un rééchelonnement de la dette et d'une réduction des intérêts dus. Mais quid des autres surendettés de l'Union ?

L'autonomie institutionnelle de la zone euro par rapport à l'ensemble de l'Union européenne est davantage marquée depuis le début de la crise des dettes souveraines. Des organes intergouvernementaux nouveaux et informels (l'Eurogroupe et le Sommet de la zone euro) ont été nidifiés au sein du système institutionnel de l'Union européenne. Par ailleurs, les Etats de la zone euro ont conclu entre eux des traités et accords internationaux pour renforcer leur coopération en dehors du cadre institutionnel de l'Union.

La faillite de la Grèce est proche. La France n'est pas à l'abri. Pas même la Banque centrale européenne. Une restructuration des dettes et le recours à la planche à billets paraissent inévitables. Mais privilégiant les sirènes des banques plutôt que les cris de leurs citoyens, les Etats repoussent l'échéance et soldent les acquis sociaux d'après-guerre. La déflation est au bout du chemin.

L'Europe bricole des solutions à la crise de la dette grecque comme si elle était sans précédent. Et l'on commet les mêmes erreurs qu'avec les pays pauvres : transfert du risque de défaut du privé au public, retard des plans d'allégement. In fine, la facture s'alourdit. Plaidoyer pour un mécanisme de mise en faillite des Etats.

Pour l'Europe du Sud, la monnaie unique signifie désormais chômage et abandon de souveraineté. Ce symbole ultime de l'alliance européenne survivra-t-il aux divergences d'intérêt ? L'Europe réinventera-t-elle un projet qui fédère, au service des peuples ? Plus que monétaire, l'enjeu est social. Et politique.

La crise des dettes publiques en zone euro reste entière. Pourquoi ne pas annuler ces dettes ? Une proposition iconoclaste qui mérite l'attention.

Le 7 mai 2010, la crise économique a connu un nouveau rebond qui touche cette fois-ci directement l'Europe, la monnaie unique et la capacité des Etats à intervenir dans l'économie. Alors qu'on a célébré un peu vite le retour des Etats en 2008, on voit maintenant les risques liés à leur endettement. Mais pourquoi a-t-on été pris de court, alors que les signes de nos difficultés étaient lisibles depuis longtemps ?