Pour cette fin d'année, la "NRF" se tourne un instant vers le musicien Ton Koopman, l'un des plus grands interprètes actuels de Jean-Sébastien Bach. A quoi cela tient que cette musique paraît s'élever de terre ?

La scène se passe quelque part aux confins de l'Ouganda et du Soudan du Sud, trois jeunes gens qui déambulent dans le bush - une sorte de terrain vague à l'échelle d'une prairie entière. C'est une scène du film de Jonathan Littell, "Wrong Elements", dix ans après la parution spectaculaire des "Bienveillantes". Changement de décor - hors fiction : ici trois jeunes gens, kidnappés à la fin des années 80 par les membres d'une secte, la Lord's Resistance Army, l'Armée de résistance du Seigneur. Ils avaient quinze ans, on a fait d'eux des tueurs, des tortionnaires.

"Les disparitions récentes de Jean d'Ormesson et de Johnny Hallyday, presque au même moment, ont paru symboliser la fin d'une certaine histoire française. L'académicien incarnant un type d'homme de lettres «à l'ancienne » familier de toutes les bibliothèques ; le chanteur, un artiste en qui se reconnaissait une France populaire, et même bien au-delà. On a eu l'impression d'une «page qui se tournait» et que nous ne reverrions pas de sitôt des personnages du type de Jean d'Ormesson. Est-ce aussi votre avis ?"

On ne saurait compter le nombre de métiers exercés par Claude Perdriel, tout au long d'une existence de chat qu'il n'a pas cessé d'être jusqu'à ce jour du printemps dernier où, posté au coin de son canapé, il répond aux questions de la NRF. Bougnat, polytechnicien, inventeur de water-closet... Inventeur de journaux, surtout. "Le Nouvel Obs" demeure le grand oeuvre, mais aussi "Le Matin de Paris", mais aussi "Le Sauvage", pionnier en matière d'écologie, et puis la finance et les affaires avec "Challenges".

Soljenitsyne a voulu écrire, en l'épousant, le processus qui a conduit, finalement, à la prise du pouvoir par les bolcheviks en octobre 1917, neuf mois après une première révolution (en février) prometteuse, éprise de liberté et de nouveauté. Commencé en août 14 alors que la Russie s'enfonce dans la Première Guerre mondiale, le cycle s'achève en avril 17...

La projection de votre film "Les enfants du 209 rue Saint-Maur" a quasiment coïncidé avec la mort de Claude Lanzmann. Quelle place tenait-il dans votre travail de cinéaste ? Une place dynamique ou encombrante ?

A quelle station prendre ce train qui a l'air de rouler vers le sud en roulant vers le nord ? Franck Venaille ne nous a pas facilité la tâche, laissant derrière lui un sillage «poétique» résolument intraduisible dans le langage courant des anthologies thématiques. Il était né en 1936, deux ans de guerre d'Algérie à son actif (ce sera le titre d'un de ses livres, "La guerre d'Algérie"), mais qu'il n'abordera qu'en 1978, chez Minuit.

A moins de se replonger dans la lecture de vieux numéros de la revue "Rock & folk" pour y retrouver la trace d'anciennes émotions qui ne disent plus rien à personne, on voit mal comment une "histoire du rock en France" pourrait être possible. Mais justement, au mois de mai dernier, Serge Loupien a consacré un livre entier à cette histoire évanouie : "La France underground, 1965-1979. Free jazz et rock pop, le temps des utopies" aux Éditions Rivages.

Philosopher, c'est apprendre à mourir, cela peut faire l'objet d'un colloque entre amis. Onfray pratique une politesse quasi militaire, il n'aime pas perdre son temps. Il a fait ses choix, au moins l'on sait avec quoi être d'accord ou non. L'intellect marche ici avec les mésaventures de la santé physique, AVC et autres fariboles qui font passer sur l'échine le vent du mauvais jour.

Alain Finkielkraut qui publie au même moment un essai en forme d'autoportrait. N'allons pas y attendre un strip-tease émotionnel qui ne s'y trouve pas. Mais il était intéressant de délaisser un instant les fureurs du polémiste pour une conversation plus apaisée, et remontant plus haut dans le temps vers les années 60 et plus haut encore à l'écoute de l'histoire familiale, père rentré d'Auschwitz, grands-parents non revenus.

Philosophe, sociologue, Edgar Morin, bientôt centenaire, appartient à l'histoire de presque deux siècles. Ce penseur qui a été mêlé de près aux tumultes intellectuels de l'après-guerre dispose désormais d'une amplitude de vue qui voit plus loin que les cadres imposés par des mémoires trop immédiates. C'est un bon moment pour engager avec lui la conversation d'un honnête homme qui a cherché, sa vie durant, à nommer la « modernité » de son temps, à la comprendre dans sa complexité.

Paul Morand symbolise deux choses violemment contradictoires. D'une part, l'esprit cosmopolite de la Belle Epoque, qui fut une fête pour les arts et la littérature, de l'autre l'esprit pétainiste des années Vichy où il occupa des fonctions diplomatiques entre 39 et 43, au plus noir de la période. Un côté solaire, heureux, un bonheur de Côte d'Azur et puis un côté sombre, étroit, petit-bourgeois égoïste. Brillant.