"Knives and Skin" débute par une scène saisissante. Une mère, armée d'un grand couteau de cuisine, frappe à la porte de sa fille et, avec sa petite voix à la fois soucieuse et inquiétante, on dirait le loup devant la maison des trois petits cochons. Mais dans la chambre de l'adolescente - cet univers mystérieux encore emprunt des charmes de l'enfance où la mère semble en terre étrangère - nulle trace de Carolyn. La jeune absente est dehors, elle flirte avec un garçon ; au moment de passer à l'acte, elle se rétracte et le garçon la violente.

Harry Kümel revient sur Les Lèvres rouges qui ressort en salle le 11 mars 2020.

Quel mal étrange frappe les personnages de cinéma ? On les voit errer, hébétés, dans un Japon de fin du monde ("Invasion" de Kurosawa), dans les casinos de Las Vegas ("Twin Peaks", le retour) ou dans les villages fantômes du nord de la France ("Coincoin et les z'inhumains"). Partout les mêmes symptômes : ces êtres auxquels la conscience échappe et dont les corps se dédoublent, évoluent dans un cauchemar burlesque et violent. Ces films nous parlent du refus de l'altérité se transformant en cancer et de migrations impossibles dans un monde de plus en plus verrouillé.

A la rentrée, un tir groupé de livres a dit l'originalité, l'importance et la poésie de sa réflexion : réédition de "Tous les chevaliers sauvages", son livre sur "Hara-Kiri", reprise de "La Main gauche" de David Lynch, complété et transformé en "Trois essais sur Twin Peaks", et publication de "Sycomore Sickamour", étude sur la malédiction de l'amour "enténébré" de Shakespeare à Jacques Rivette et Lynch encore. Les livres de Pacôme Thiellement sont des armes pacifiques pour lutter contre un monde toujours plus destructeur et invivable.

Tod Browning avait raison : ce n'est pas à nous d'intégrer les monstres dans notre société, c'est à eux de nous tolérer. C'est l'un des thèmes de cet étrange film, réalisé par un jeune cinéaste iranien immigré en Suède à l'âge de 22 ans. Son premier long métrage, "Shelley" (2016), était un film d'horreur où une jeune roumaine, mère-porteuse d'un couple de suédois, était envoûtée par une force maléfique venue des profondeurs de la forêt. Border s'inscrit dans la même veine de réalisme fantastique, explorant les zones d'ombres de cette Suède au «modèle» tant vanté. Sommaire. Les amours trolls.

La Palme d'or décernée au formidable "Parasite" consacre l'oeuvre de Bong Joon-ho. C'est une joie de voir ainsi couronné ce cinéaste de 49 ans au moment où, après deux productions internationales ("Transperceneige", "Okja"), il revient au pays de ses chefs-d'oeuvre ("Memories of Murder", "The Host"). Cet entretien a été réalisé avant Cannes et la critique de "Parasite", en salle depuis le 5 juin, été publiée dans notre numéro de mai 2019.

"Les Enfants de la mer" est le quatrième long métrage d'Ayumu Watanabe , auquel on doit deux aventures du chat bleu sans oreilles, Doraemon , pendant les années 2000, et "Space Brother" en 2014. Cinéaste de la génération de Keiichi Hara et Masaaki Yuasa, il adapte avec "Les Enfants de la mer" le manga de Daisuke Igarashi , et se montre à la hauteur de ce chef-d'oeuvre écologique et initiatique. Quelques données chiffrées.

Bruno Dumont poursuit son travail autour de la figure de Jeanne d'Arc avec "Jeanne". Les "Cahiers" consacrent quatre articles à "Jeanne" : "L'enfant qui voulait tuer la guerre", critique du film ; "Le coeur de Jeanne", entretien avec le réalisateur ; "Un cinéaste sans images", entretien avec le compositeur et chanteur Christophe, au casting du film ; "La petite Lise", entretien avec Julie Sokolowski.

Montage de cinq épisodes d'une série télévisée, "Invasion" n' est pas une suite ou une préquelle d'"Avant que nous disparaissions" (sorti en mars 2018), mais un film parallèle reprenant à zéro, avec d'autres personnages, l'infiltration des "voleurs de concepts" extraterrestres. Même s'il est sans doute trop long et souffre de répétitions et stagnations inhérentes à la forme sérielle, "Invasion" est un passionnant laboratoire des peurs contemporaines.

Une nuée d'éditions de films de Jess Franco invite à revisiter l'oeuvre, notamment française, de ce prince terrible et frénétique des salles de quartier des années 70.

C'est l'histoire très belle d'un gangster dont la tête est mise à prix et qui voit dans son sacrifice l'occasion d'offrir une vie meilleure à son épouse. Chargée d'apporter la prime à sa femme, une prostituée l'accompagne dans son voyage vers la mort. À travers ce thème de film noir d'une pureté presque mythologique, Diao Yinan se live à un époustouflant exercice d'hypnose, enchaînant courses en motos dans la nuit, folies chromatiques et scènes d'action imprévisibles.

La collection « Roman Porno » éditée par Elephant Films (17 décembre 2019) met à l'honneur le cinéma érotique japonais des années 70 ainsi que ses versions contemporaines.

"Les Cahiers du cinéma", à l'occasion de la sortie en salles des "Funérailles des roses" en février 2019, remettent à l'honneur le cinéma expérimental japonais de la fin des années 60. "Oedipe queen" livre une critique détaillée du film. "A travers le miroir" est la publication d'un entretien réalisé en 2011 avec le réalisateur, Toshio Matsumoto, décédé en 2017.

Depuis plus de 50 ans, ce dandy infatigable promène sa beauté hypnotique dans le cinéma mondial. Dans les films d'horreur déchaînés de Paul Morrissey, il fut le plus halluciné des Frankenstein et un Dracula viscontien, transformant les figures gothiques en créatures subversives et érotiques. De Fassbinder à Guy Maddin en passant par Gus Van Sant et Lars von Trier, il fait partie de ces acteurs rares enrichissant les films d'une esthétique qui leur est propre.

Malgré son titre évoquant une épidémie ou un monstre extraterrestre, "Parasite" s'avère une comédie sociale, noire et ambitieuse, ancrée dans la Corée contemporaine. Après dix ans consacrés à des productions internationales ("Snowpiercer", "Okja"), Bong Joon-ho est bien revenu au pays. Il en retrouve les acteurs comme le fidèle Song Kang-ho et le très populaire Lee Sun-kun ("Haewen et les hommes", "A Hard Day"), mais rassemble également trois générations composant les deux familles du film.

Après "Victoria", Justine Triet donne un autre prénom à Virginie Efira et porte leur collaboration à un point d'incandescence rare. Dans "Sibyl", Efira est de toutes les scènes, se partage entre le passé et le présent, entre la sobriété et l'ivresse, entre le soleil méditerranéen et les ténèbres de l'évanouissement. Sommaire. Anatomie de l'actrice, critique du film. Une nécessité de la fiction, entretien avec Justine Triet.

Stéphane de Mesnildot livre la critique du film intitulée "Denier voyage".

Un an après "Your Name", "Fireworks" de Nobuyuki Takeuchi marque la diffusion en France d'une certaine animation de studio, moins portée sur la beauté graphique comme celle des esthètes de Ghibli que sur le dynamisme et l'ivresse narrative. Comme dans bien des récits fantastiques japonais, l'action se déroule pendant un "matsuri", un de ces festivals d'été où sont tirés les feux d'artifice, et qui déjà sont des réconciliations entre le passé et le présent.

A la découverte du cinéma de Nobuhiko Obayashi, peuplé d'adolescentes, dévoré de visions et quasi inconnu hors du Japon. Sommaire. La folie Obayashi. En souvenir de la guerre, entretien avec Nobuhiko Obayashi.

Depuis la fin des années 90, Bertrand Mandico façonne des courts et moyens métrages ne relevant d'aucune catégorie identifiée. On y croise aussi bien des cinéastes oubliés dans la campagne polonaise ("Boro in the Bo"x), qu'une Jeanne d'Arc défigurée errant sur les champs de bataille ("Y-a-t-il une vierge encore vivante ?") ou les fées de Jacques Demy prises de fièvre pornographique ("Notre-Dame des hormones").

Pour saluer la rétrospective consacrée à Brian De Palma à la Cinémathèque française, retour sur un des sommets de son cinéma : la séquence du musée de "Pulsions". Huit minutes muettes où Kate Miller (Angie Dickinson), bourgeoise insatisfaite, tente de séduire un inconnu dans un musée.

Quand Fritz Lang donne vie à l'écran au personnage de papier du Docteur Mabuse (imaginé par l'auteur luxembourgeois Norbert Jacques), il ouvre la voie à un longue série de films. Retour sur images.

Avec "Dans un recoin de ce monde", Sunao Katabuchi, scénariste et réalisateur de films d'animation japonais, explore le quotidien du Japon en guerre. Son héroïne s'efforce de maintenir la joie et l'art de vivre.

Critique du film "Creepy" de Kiyoshi KUrosawa.

Si le passage du lumineux "Au revoir l'été" au sombre "Harmonium" pouvait dérouter, c'est parce qu'une étape manquait entre ces deux films de Koji Fukada : l'insolite et hanté "Sayonara" , datant de 2015, était resté inédit chez nous. Critique et entretien.

Jacques Becker est le plus méconnu des grands cinéastes français. Derrière le classique "Le Trou" et le mythique "Casque d'or", c'est une oeuvre secrète, politique et noire, que la Cinémathèque française nous invite à redécouvrir du 5 au 29 avril 2017.