Nous souhaitions nous entretenir avec Cate Blanchett depuis longtemps. Sa venue à Cannes en est l'occasion. "Rumeurs", coproduit par sa société Dirty Films et réalisé par Guy Maddin, Evan Johnson et Galen Johnson, semble avoir représenté pour elle une expérience singulière et inédite. Le temps qu'elle nous a accordé a permis à la discussion de dépasser le commentaire d'une trajectoire ou d'une carrière pour évoquer son métier, entre instinct et technicité.

Les titres des films de la compétition officielle composent comiquement un commentaire possible de la 76e édition du Festival de Cannes, la première présidée par Iris Knobloch, longtemps aux mêmes fonctions chez Warner et censée s'assurer qu'Hollywood ne délaisse pas la Croisette pour la Lagune: face au confort suspect que le retour des "Vieux Chênes" assure (Wenders, Loach, Moretti), se dirige-t-on "Vers un avenir radieux" tissé de "Perfect Days" et étincelant de "Jeunesse", ou vers l'"Anatomie d'une chute" dont les témoins festivaliers, en "Club Zéro" de l'apocalypse des salles, brouteront l

Quand on s'inspire d'un fait divers, deux chemins sont possibles. Le premier, majoritaire, est celui de l'énigme et l'enquête après un crime. Le deuxième, plus secret, celui de la disparition, et donc de l'absence même du crime. Sommaire. Fausses fuyantes, la critique du film. Clair avec soi-même, entretien avec Christine Dory.

Il est inhabituel de voir un road-movie qui n'évoque pas, en dépit de tous les malheurs et contretemps subis par ses protagonistes, la liberté de la route, la pulsion de la fuite, la grandeur du paysage. Sommaire. Force matrice, la critique du film. Sans marche arrière, entretien avec Ilya Povolotsky

Quand Miranda July s'est invitée au cinéma en 2005, il était tentant de la rapprocher (non pas l'intégrer, tant il serait réducteur de la considérer uniquement comme une cinéaste) d'une certaine tendance du cinéma américain post-Tarantino: chez Wes Anderson, Spike ]onze ou encore Todd Solonz, les formes sont précieuses et calmes, le bricolage prolixe et doux, dialoguant sans forçage avec le clip et la culture populaire, et le trouble est véhiculé surtout par le déséquilibre existentiel des personnages.

Outre son excellente carrière d'actrice, Ida Lupino a réalisé sept longs métrages, dont cinq ressortent ce mois-ci en version restaurée, tous produits par sa propre société, The Filmakers : "Not Wanted", "Never Fear", "Outrage", "The Bigamist" et "Le Voyage de la peur". Cinq films qui confirment qu'elle a été la plus grande des acteurs ou actrices de l'âge classique hollywoodien passés derrière la caméra.

Dans l'histoire du cinéma d'avant-garde à Paris, la création de Re: Voir il y a vingt-cinq ans fait date. Pour la première fois, un éditeur et une boutique permettaient, depuis la France et pour le monde entier, d'avoir accès à des films de Stan Brakhage, Maya Deren, Peter Emanuel Goldman, Jonas Mekas, Stephen Dwoskin, Rose Lowder ou encore Hans Richter, en format domestique grâce au support VHS, puis DVD, Blu-ray et aujourd 'hui en VOD, en attendant la création d'une plateforme SVOD.

"Mandibules" confirme la place très singulière qu'occupe Quentin Dupieux dans le cinéma français singulière au point de diviser encore beaucoup. Les "Cahiers" l'ont toujours soutenu, comme ils détendirent autrefois, toutes (dis)proportions gardées, Jerry Lewis, contre ceux qui ne voient que potacherie là où se manifeste un sens très original de la comédie, ou qui considèrent comme simplement désinvolte une économie tonnelle et un art du récit beaucoup plus précis qu'on pourrait le croire au premier abord.

Le onzième long métrage de David Fincher revient sur la polémique autour du crédit du scénario de "Citizen Kane", partagé entre Orsan Welles et Herman Mankiewicz, frère de Joseph , affaire bien connue. Welles, bénéficiant d'une carte blanche de la RKO, avait choisi "Mank" pour écrire son premier film , avant de tenter de le dissuader d'inscrire son nom au générique.

Posons-le d'emblée, "Wanda Vision" n'est pas une série. C'est plutôt, et littéralement, un programme. Centré sur deux personnages issus des films « Avengers », Wanda Maximoff, la Sorcière rouge, et The Vision (sorte de robot quantique très zen), il en annonce d 'autres et, ce faisant, prononce et affirme l'occupation non pas d'un format ou d'un support, mais d'un espace : la maison.

Il y y a des films derrière lesquels on devine en filigrane une figure de cinéaste particulièrement libre, torturée, intégrée, ou particulièrement isolée... En voici un qui nous permet de deviner un Grémillon, le terme est adéquat, étrange. On y perçoit une pureté d'esprit capable de contempler les défauts humains dans leur intégralité sans les juger. Mais peut-être avec trop de passion et d'humour, d'où l'étrangeté.

La parution dans sa traduction française d'"Il était une fois à Hollywood", remake littéraire de "Once Upon a Time... in Hollywood", est d'abord l'occasion de revenir sur un film que les "Cahiers" ont à sa sortie trop négligé, et qui s'avère être tout simplement l'une des plus grandes oeuvres américaines de ces dix dernières années.

Cette année 2021, les Etats généraux du film documentaire de Lussas ont été marqués par une impressionnante rétrospective de films hongrois.

C'est toujours bon signe quand dévoiler aux autres le secret d'un film semble imprudent, à fortiori s'il ne contient aucun suspense, twist, révélation ou autre ruse scénaristique. Ces aspects comptent si peu ici qu'il semble difficile de dire à quel moment de "Serre-moi fort" on comprend ce qu'est ce film. Sommaire. La vie des morts. Devenir un type bien : entretien avec Mathieu Amalric.

Parmi les films présentés à Cannes en 2021 qui ont particulièrement frappés aux "Cahiers du cinéma" et qui sortent en salle pendant l'été, nous nous penchons ici plus longuement sur quatre : "Annette" de Leos Carax, "Benedetta" de Paul Verhoeven, "France" de Bruno Dumont, "Drive My Car" de Ryusuke Hamaguchi. Les journalistes de la revue se sont notamment intéressés à leur génèse et fabrication. Sommaire. Une chambre à soi. Un certain sens du sacré, entretien avec Paul Verhoeven.

S'il est souvent parfaitement légitime de se méfier des critiques d'outre-Atlantique sur les films de Clint Eastwood (précaution nécessaire qui n'a fait que s'accroître avec le temps), les premiers retours français semblaient confirmer le mauvais accueil américain : "Cry Macho" serait un film "mineur", au mieux "fragile", au pire "dispensable". Rien de tout cela n'est tout à fait faux, mais un tel jugement reviendrait à ignorer deux points essentiels. D'abord, que la beauté du cinéma d'Eastwood a peu à voir avec la "grandeur" ou avec l'ambition.

Portant bien son nom, la série HBO "Succession" arrivait en 2018 dans un creux. Depuis, elle a comblé un double vide : celui des grandes séries et celui de la comédie américaine, soit les deux phénomènes qui ont, aux Etats-Unis, le plus intensément marqué ce début de siècle cinématographique.

Au cours de ces derniers mois, les toutes récentes saisons (troisième et dixième respectivement) de "Mme Maisel, femme fabuleuse", d'Amy Sherman-Palladino, et de "Curb Your Enthousiasm" (littéralement, "modère ton enthousiasme", titre qui s'est imposé face à la version française "Larry et son nombril") de et avec Larry David, se sont pratiquement enchaînées. C'est en soi presque drôle, tant le personnage principal de la première fait tout sauf modérer son enthousiasme, mais le dialogue que les deux séries entretiennent va bien plus loin.

"Old", l'un des plus beaux films de l'année 2021, n'a pas contredit le grand attachement que les "Cahiers" ont toujours eu pour M. Night Shyamalan. Par sa façon de travailler très directement sur l'imaginaire et le mythe tout en restant fidèle à son goût de la litote et du réalisme, soit à contre-courant de la surenchère spectaculaire et du recyclage mercantile, il continue à occuper une place très singulière, et même salutaire, au sein du cinéma américain.

C'est l'un des moments les plus célèbres de la filmographie de Jean-Luc Godard : dans "Deux ou trois choses que je sais d'elle", ce long et très gros plan d'une tasse de café dont l 'inertie après avoir été remuée permet de figurer le mouvement même des galaxies.

Faire passer le récit d'une désillusion grande comme un pays entier par un simple souvenir d'enfance, autant dire par le chaos d'une aiguille : c'est d'abord avec ce pari qu'"Armageddon Time" se distingue, au milieu du joyeux bain de nostalgie où s'épanouit le meilleur cinéma américain récent. Sommaire. Histoire d'un oubli, la critique du film par Yal Sadat. Fantômes familiers, entretien avec James Gray par Fernando Ganzo et Yal Sadat.

A quoi ressemblerait aujourd'hui un film qui ferait l'unanimité ? Depuis sa projection primée à Venise, étiquette "choix français pour les Oscars" et Prix Jean Vigo à l'appui, "Saint Omer" semble être de ceux-là. Comprendre : il serait conciliant et pas subversif, rassurant et pas provocateur, lisse et pas rugueux ; bref, idéologiquement et esthétiquement dans "l'air du temps".

Beauté de la langue française, pour parler des nuances d'un parfum on emploie souvent le mot « soupçon ». Comme dans tant de thrillers et films d'espionnage, le soupçon est le moteur du "Parfum vert" de Nicolas Pariser. Mais il ne vient jamais seul, ayant souvent comme moteur la paranoïa, qui fait entrer dans ces récits des forces contraires, d'où souvent l'apparence de films faits de collisions permanentes. Sommaire. Espions sur le Danube, la critique du film. L'humour aux trousses, entretien avec Nicolas Pariser.

Avec "Petite Solange", Axelle Ropert fait preuve d'une double audace : filmer un drame en apparence petit, banal, et le faire au premier degré, au ras des sentiments. C 'est l'histoire courante d'un divorce, mais tel qu'il est vécu par une adolescente, Solange, 14 ans (Jade Springer), découvrant le désamour progressif de ses parents, subissant leur séparation puis la vente de la maison familiale.

Dans "The Souvenir - Part I" (2019), Anthony (Tom Burke), le compagnon de la jeune Julie (Honor Swinton Byme) dont on comprend qu'il est son premier grand amour, débarque en pleine crise de mangue. La dose d'héroïne que son corps réclame fait de cet homme fin, plus âgé qu'elle et qui travaille pour le ministère des Affaires étrangères, un monstre hurlant, dont la chemise tachée de sang parachève ce qui apparaît pour l'étudiante de cinéma comme un quasi-film d'horreur : l'addiction à laquelle elle était aveugle se manifeste enfin devant ses yeux en une scène qui relève de la lycanthropie.

« C'est pas ton monde », prévient Michel (Roschdy Zem), tout juste sorti de prison mais prêt à faire un dernier petit braquage : cette exclusion vise à rassurer son beau-fils de fraîche date, Abel (Louis Garrel), qui lui rétorque : « A ma connaissance, y en a qu'un seul, de monde. » "L'Innocent" s'emploie à faire tenir ensemble ces deux affirmations contradictoires. Sommaire. Un seul monde, une autre histoire, la critique du film. Si Godard l'a dit, entretien avec Louis Garrel.

"Frère et soeur" s'avance en montrant son masque : son titre annonce un retour du cinéaste à un thème de prédilection, tout en pointant le danger conscient que sa filmographe constitue elle-même une fratrie obsédante, enfermée dans un ressentiment recuit, rassurée par la position démiurgique que s'assigne l'auteur dans ce huis clos reconduit, cette cousinade d'histoires croisées.

S'il est difficile, devant tout premier long métrage, de résister à la tentation de chercher des influences, c'est particulièrement le cas pour "Astrakan", tant David Depesseville ne dissimule pas son héritage. Sommaire. "L'enfance mue" présente la critique du film par Fernando Ganzo. "Une certaine famille", entretien avec David Depesseville.

Dans "Seuls les pirates" (Grand Prix du FID en 2018, enfin en salles), Géro, qui se rêve hors-la-loi et hors-sol, tente de maintenir actif son petit théâtre, privé de subventions, et se retrouve menacé de délogement par la construction d'un éco-quartier. La responsable de la mairie fantasme en novlangue mais avec sincérité un « vivre ensemble » écologique. Sommaire. Périphériques solitudes, la critique des films "Seuls les pirates" et "Des garçons de province". Ses Provinciales, entretien avec Gaël Lépingle